Allemagne

La croissance économique devrait rester solide et le taux chômage devrait continuer de diminuer. Ce chômage limité et l’augmentation des dépenses publiques contribueront à soutenir la consommation privée. La faiblesse des taux d’intérêt et l’immigration devraient soutenir l’investissement résidentiel, mais l’investissement des entreprises ne s’affermira que progressivement. Les exportations bénéficient de la vigueur de la demande en Asie et aux États-Unis, mais fléchiront à mesure que l’effet de la dépréciation antérieure de l’euro s’estompera et que la croissance des importations en Chine ralentira. L’excédent des paiements courants se réduira quelque peu, principalement sous l’effet de l’augmentation des prix de l’énergie. La forte croissance des recettes devrait permettre aux administrations publiques de conserver un solde budgétaire excédentaire.

Le pays doit adopter une politique budgétaire plus porteuse pour remédier aux faiblesses structurelles qui font obstacle à une croissance inclusive. Les hausses de dépenses devraient être consacrées en priorité à la formation des migrants, à l’amélioration des services d’accueil des jeunes enfants et à la généralisation de l’enseignement primaire à plein temps. L’abaissement des taux d’imposition appliqués aux deuxièmes apporteurs de revenu permettrait de réduire les obstacles qui empêchent les femmes d’accéder à des emplois et des carrières plus attrayants, avec pour conséquence une augmentation de l’offre de main-d’œuvre qualifiée sur un marché du travail tendu.

Une forte intégration dans les chaînes de valeur mondiales (sous l’effet notamment de l’externalisation d’activités à forte intensité de main-d’œuvre et de l’augmentation des ventes sur des marchés dynamiques lointains, en particulier en Asie), la dépréciation de l’euro et la modération salariale ont rendu très compétitifs les fabricants allemands. Le nombre de travailleurs percevant un salaire relativement faible a augmenté, la mobilité ascendante sur l’échelle des revenus a diminué et la durée moyenne des épisodes de chômage est longue, même si la pauvreté demeure faible. Le niveau élevé d’épargne des ménages, la faiblesse de l’investissement des entreprises et l’assainissement budgétaire sont autant de facteurs qui ont contribué à l’ample excédent des paiements courants. Des réformes visant à supprimer les obstacles à l’entrée sur les marchés de services et à développer les infrastructures publiques stimuleraient l’investissement et réduiraient le volumineux excédent des paiements courants.

La croissance est vigoureuse et repose sur une large assise

L’Allemagne a connu une forte expansion économique, la dépréciation de l’euro et la vigueur de la demande aux États-Unis et en Chine ayant donné un coup de fouet aux exportations. Les activités de construction ont augmenté du fait de la hausse de la demande de biens immobiliers d’habitation, qui s’explique par les besoins de logement des migrants et la faiblesse des taux d’intérêt. Les prix de l’immobilier résidentiel ont augmenté à peu près au même rythme que les loyers et les revenus. L’emploi a progressé, confortant la croissance de la consommation des ménages. L’augmentation des salaires est restée modérée au cours de la période récente, malgré le niveau historiquement bas du chômage et la hausse du nombre d’emplois vacants. Cette situation tient en partie à la faiblesse des salaires de départ offerts aux migrants et au fait que les actifs âgés se montrent de plus en plus disposés à travailler pour une rémunération plus modeste. Grâce à des taux d’intérêt faibles et à un taux élevé d’utilisation des capacités, la rentabilité des entreprises est demeurée forte. L’investissement des entreprises n’en est pas moins resté en demi-teinte, modérant la croissance du crédit.

Allemagne
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1. Données non corrigées des variations saisonnières et des jours travaillés, sur la base des déflateurs des ventes du secteur manufacturier. Moyenne depuis 1991 = 100.

Source : Banque fédérale allemande (Deutsche Bundesbank).

 https://doi.org/10.1787/888933503130

La politique budgétaire devrait favoriser davantage une croissance inclusive

L’orientation de la politique budgétaire devrait être modérément expansionniste en 2017 et 2018, en raison de la hausse des dépenses consacrées à l’intégration des migrants, aux prestations de dépendance, ainsi qu’à la défense et la sécurité. L’État fédéral a également accru ses transferts destinés à financer l’investissement des collectivités locales. Les dépenses de retraite augmentent automatiquement en vertu des dispositions qui régissent les droits à prestations, les salaires progressent dans le secteur public, et les prestations familiales et abattements fiscaux sont devenus plus généreux.

DEU1. Emploi, revenu et inflation
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 https://doi.org/10.1787/888933505296

Toutefois, compte tenu de la solidité de ses finances publiques, l’Allemagne dispose des marges de manœuvre nécessaires pour financer des dépenses prioritaires et des réformes fiscales. En augmentant les dépenses de manière à améliorer les services d’accueil des jeunes enfants à plein temps et à généraliser l’enseignement primaire à plein temps, on aiderait les familles – et en particulier les femmes, qui sont les plus touchées – à mieux concilier vie familiale et emploi à plein temps, ce qui entraînerait une hausse de l’offre de main-d’œuvre qualifiée. Ces mesures contribueraient également à améliorer les résultats scolaires des jeunes issus de milieux socioéconomiques défavorisés. L’investissement public reste insuffisant pour compenser la dépréciation du stock de capital, en particulier dans les communes à faible revenu, et devra être renforcé. L’abaissement des taux d’imposition appliqués aux deuxièmes apporteurs de revenu améliorerait les possibilités de carrière des femmes et réduirait l’important écart de rémunération entre hommes et femmes.

Allemagne
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1. Personnes âgées de 15 à 74 ans. Sur la base de l’enquête sur la population active en Allemagne.

2. Offres d'emploi non satisfaites en pourcentage de l'emploi total.

3. Salaire nominal moyen par employé. Prévisions à partir du premier trimestre 2017.

4. Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH). L'IPCH sous-jacent ne tient pas compte des prix de l'énergie, de l'alimentation, de l'alcool et du tabac.

Source : Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 101 ; et Statistisches Bundesamt.

 https://doi.org/10.1787/888933503149

Les conditions qui prévalent sur les marchés de capitaux accompagnent la croissance économique, reflétant le caractère très expansionniste de la politique monétaire dans la zone euro et l’attrait que continue d’exercer l’Allemagne en tant que place refuge. Les cours des actions se sont appréciés et les taux d’intérêt à long terme demeurent très bas. Les grandes banques restent cependant fortement endettées. Les garanties publiques implicites pourraient exacerber les inégalités, constituer un facteur d’inefficience et inciter les banques à prendre davantage de risques et à verser des salaires plus élevés. La dépréciation récente de l’euro dope les exportations. Néanmoins, les perspectives de croissance modestes et incertaines qui prévalent sur les marchés d’exportation européens voisins ont renforcé les incitations à investir sur des marchés éloignés.

DEU2. Indicateurs financiers
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 https://doi.org/10.1787/888933505315

Des réformes sont par ailleurs nécessaires pour favoriser une croissance durable et inclusive et une augmentation des revenus. La réduction des obstacles à la création d’entreprises, par exemple dans les branches liées à la construction, permettrait d’élargir le champ des possibilités économiques offertes aux migrants, qui sont particulièrement susceptibles de rechercher une activité indépendante ou un emploi dans le secteur du bâtiment, et pourrait contribuer à atténuer les insuffisances de l’offre dans ce secteur et à améliorer la mobilité ascendante sur l’échelle des revenus. L’abaissement des obstacles à l’entrée dans les télécommunications, les services postaux, le transport ferroviaire, les services professionnels ainsi que dans certains métiers pourrait donner un coup de pouce à l’investissement et, ce faisant, contribuer à réduire l’excédent des paiements courants. L’adoption de mesures visant à éviter que les entreprises en place ne soient favorisées par les nouveaux instruments de réglementation et la privatisation des sociétés des secteurs de l’automobile, des télécommunications et des services postaux, dont l’État est actionnaire, seraient également propices à l’investissement. La mise en œuvre de réformes visant à achever la mise en place du Marché unique dans l’Union européenne et à établir une Union bancaire plus complète dans la zone euro pourrait consolider la confiance dans l’euro et accroître l’attractivité de l’Allemagne aux yeux des investisseurs. L’amélioration des possibilités de formation tout au long de la vie réduirait l’inadéquation des compétences, qui représente un autre frein à l’investissement dans les nouvelles technologies. Elle aiderait également les travailleurs privés de leur emploi par les avancées technologiques ou les échanges à retrouver du travail plus rapidement. Un accès facilité à des régimes de retraite privés peu coûteux et la mise en place d’incitations à partir plus tard à la retraite pourraient accroître la consommation et le bien-être, tout en permettant de réduire l’excédent des paiements courants.

DEU3. Demande et production
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 https://doi.org/10.1787/888933505334

La demande intérieure sera le principal moteur de la croissance

La croissance économique devrait rester dynamique en 2017 et 2018, portée par la demande des ménages et la hausse des dépenses publiques. La baisse du chômage et la vigueur de la demande de main-d’œuvre feront progresser les salaires, dont l’augmentation devrait dépasser celle de la productivité. La hausse des prix à la consommation s’accélèrera légèrement. L’excédent des paiements courants s’amenuisera sous l’influence de l’appréciation des cours du pétrole. La croissance des exportations pourrait fléchir en raison de la dissipation des effets de la dépréciation antérieure de l’euro et des retombées négatives de la hausse des salaires sur la compétitivité de l’Allemagne à l’intérieur de la zone euro. La croissance de la demande de la Chine, un des principaux marchés d’exportation du pays, devrait également perdre de sa vigueur en 2018. Malgré l’assouplissement budgétaire, la forte croissance des recettes fiscales devrait permettre aux administrations publiques de conserver un solde budgétaire des administrations publiques excédentaire.

La sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (« Brexit ») et les préoccupations liées à certains problèmes du secteur bancaire dans la zone euro ont accru l’incertitude entourant l’évolution des échanges et de l’investissement. Un ralentissement marqué de l’activité dans les économies de marché émergentes et un renforcement du protectionnisme commercial porteraient un coup aux exportations et à l’investissement. D’autre part, certaines entreprises envisagent de transférer leurs investissements du Royaume-Uni vers l’Allemagne. En outre, des mesures efficaces d’intégration des migrants permettraient d’améliorer leurs revenus et leur bien-être, d’augmenter l’emploi et d’atténuer les tensions sur le marché du travail.