Portugal

Une croissance modérée est prévue pour 2016 et 2017. La consommation privée s’affermira légèrement à la faveur d’un chômage en repli, de la revalorisation du salaire minimum et de la suppression des coupes dans les salaires du secteur public. Toutefois, la création d’emplois sera insuffisante pour que la hausse des dépenses de consommation conserve son rythme actuel au-delà de 2016. Le fort niveau d’endettement des entreprises et l’état de faiblesse du secteur bancaire ont bridé l’investissement, dont la reprise partielle, en 2017, compensera quelque peu le fléchissement de la consommation.

L’inflexion récente de la politique budgétaire pourrait susciter une hausse du revenu disponible, en particulier au bénéfice des ménages modestes. La dette publique est élevée, et de nouvelles mesures d’assainissement budgétaire pourraient s’avérer nécessaires pour l’inscrire sur une trajectoire décroissante.

Les goulets d’étranglement structurels freinent la croissance de la productivité. Il convient de saluer les initiatives récentes en faveur de la simplification des procédures administratives. Une action politique plus énergique en faveur du désendettement des entreprises permettrait de relancer l’investissement et – à condition de l’associer à une concurrence renforcée dans les secteurs non exportateurs – d’accélérer la réaffectation des ressources et la croissance de la productivité. Une réforme du développement territorial améliorerait encore le climat des affaires. Enfin, le rehaussement des niveaux d’instruction et de compétences, y compris par un renforcement des liens avec le secteur privé et le développement de l’enseignement et la formation professionnels, permettrait de gagner en productivité.

La croissance a marqué le pas récemment

Après une phase de reprise progressive, l’activité économique a progressé moins vite que dans la zone euro au premier trimestre de 2016, en partie à cause de la faiblesse de la demande extérieure, tandis que la consommation privée demeurait solide. L’investissement, en revanche, a nettement reculé et continue de desservir la croissance du fait du fort endettement des entreprises, de la fragilité du bilan des banques, des incertitudes entourant l’action publique et de l’essoufflement de la dynamique dans la mise en place des réformes structurelles. Le chômage demeure élevé et a légèrement augmenté au début de cette année. Quoique légèrement supérieure à la moyenne de la zone euro, l’inflation est restée modérée.

Marché du travail et prêts improductifs
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1. Retards de paiement de plus de 90 jours.

Source : Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 99 ; et Banco de Portugal.

 https://doi.org/10.1787/888933372726

La politique budgétaire s’est assouplie en 2015 et devrait rester accommodante pendant la période examinée. Le budget 2016 repose moins sur la fiscalité sur les revenus que sur celle de la consommation. Ce réaménagement de la structure des recettes publiques, en principe favorable à la croissance, pourrait néanmoins aussi avoir un effet régressif. L’application d’un taux réduit de TVA à la restauration entamera les recettes fiscales et aura sans doute un impact limité sur l’emploi. L’exécutif a renoncé aux allégements fiscaux prévus pour les entreprises, qui auraient pu stimuler l’investissement et la croissance. Les ménages modestes bénéficieront de la revalorisation des prestations sociales. D’importants risques de mise en œuvre pèsent sur les réductions de dépenses publiques escomptées. La dette publique demeure très élevée et, dans l’ensemble, les projections budgétaires actuelles ne suffisent pas à assurer sa diminution. Si les pouvoirs publics doivent veiller à ne pas étouffer la reprise fragile de l’activité, de nouvelles mesures budgétaires pourraient s’avérer nécessaires en fin de compte, notamment en l’absence d’amélioration sur le front de la productivité et donc, de la croissance à plus long terme.

Demande, production et prix
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 https://doi.org/10.1787/888933374077

Des réformes structurelles feraient gagner en productivité, favoriseraient la création d’emplois et renforceraient l’équité

Le Portugal affiche depuis plusieurs années un potentiel de croissance très modeste. Le marché du travail est fortement segmenté et le taux de chômage des jeunes se situe parmi les plus élevés de la zone euro. Les projets de réforme des administrations publiques, en particulier du système judiciaire, viendraient soutenir la productivité, tandis qu’une intensification de la concurrence dans les secteurs de l’électricité, des infrastructures portuaires et des services professionnels conduirait à des gains de productivité dans ces secteurs et dans les activités d’exportation en aval. Il est primordial de parachever la mise en place de procédures administratives simplifiées (pour aller vers le « zéro autorisation ») et de mettre en œuvre une réforme globale de la législation sur le développement territorial pour améliorer encore le climat des affaires.

Les mesures destinées à dynamiser la demande intérieure ne produiront pas d’effets durables

Les changements apportés récemment aux politiques publiques, comme la revalorisation du salaire minimum, la suppression des coupes salariales dans le secteur public et l’élimination progressive de la surtaxe extraordinaire de l’impôt sur le revenu, permettront de conserver une solide consommation privée en 2016, qui compensera en partie l’évolution défavorable de l’investissement. Toutefois, l’effet de stimulation des dépenses de consommation est limité par un taux d’épargne historiquement bas et la faiblesse de la création d’emplois, ce qui amènera un essoufflement de la consommation privée en 2017, les ménages augmentant leur épargne. À l’inverse, l’investissement devrait repartir à la hausse en 2017, tandis que des gains de compétitivité et une reprise de la demande extérieure consolideront peu à peu les exportations. Dans l’ensemble, cette évolution devrait permettre de maintenir une croissance modérée durant la période étudiée. Le compte courant continuera d’afficher un léger excédent.

En dehors de l’évolution de la situation économique en Angola, les risques sont essentiellement intérieurs et tiennent au niveau d’endettement élevé des secteurs privé et public. Un abaissement de la note de la dette souveraine du Portugal pourrait compliquer l’accès aux financements externes, y compris auprès de la Banque centrale européenne. Les banques restent sous tensions du fait d’une rentabilité limitée et d’une forte proportion de créances douteuses et litigieuses, ces deux facteurs suscitant des inquiétudes quant à la stabilité financière. À l’inverse, le déploiement abouti des initiatives récentes des pouvoirs publics visant à désendetter les entreprises et à assainir le bilan des banques pourrait atténuer leur vulnérabilité et permettre de canaliser plus de ressources vers de nouveaux investissements productifs.