Résumé

Pour contenir les risques liés au changement climatique, il est urgent d’accélérer la transition vers la neutralité en gaz à effet de serre (GES). Cette transition contribuera aussi à réduire la dépendance à l’égard des énergies fossiles et donc, potentiellement, l’exposition aux chocs futurs sur les prix de l’énergie. Pour la mener à bien, il est nécessaire de faire appel à des ensembles de mesures qui assurent aux ménages et aux entreprises un accès abordable à des solutions peu ou pas du tout émettrices de carbone.

Le rapport Tarification des émissions de gaz à effet de serre : passer des objectifs climatiques à l’action en faveur du climat montre comment les prix explicites du carbone, les taxes énergétiques et les subventions qui abaissent les prix hors taxes de l’énergie ont évolué entre 2018 et 2021. Ces instruments jouent un rôle important parmi les leviers d’action qui permettent d’accélérer la transition vers la neutralité GES. Tous ont pour effet de modifier directement le prix à payer pour émettre des GES ou de modifier les prix de l’électricité. Leur réforme peut contribuer grandement à la réalisation des objectifs climatiques tout en réduisant la pollution de l’air et de l’eau et en améliorant la situation des finances publiques.

Le présent rapport porte sur 71 pays responsables collectivement de quelque 80 % des émissions mondiales de GES et de la consommation d’énergie. Les prix explicites du carbone et les taxes et subventions énergétiques sont détaillés par pays, secteur, produit et instrument. L’utilisation d’une méthodologie commune garantit la comparabilité entre pays. De même, des indicateurs synthétiques facilitent l’établissement de comparaisons et aident les décideurs publics à suivre les progrès accomplis et à repérer les possibilités de réforme.

La base de données Taxer la consommation d'énergie et Taux effectifs sur le carbone, qui sous-tend la nouvelle Série de publications de l’OCDE sur la tarification du carbone et la fiscalité des énergies, est conçue pour permettre de suivre l’évolution au long cours de la fiscalité énergétique et de la tarification du carbone. Les taux d’imposition pris en compte dans l’état des lieux de 2021 sont ceux en vigueur au 1er avril 2021. Depuis lors, plusieurs pays ont pris des mesures pour protéger les consommateurs et les entreprises de l’impact de la flambée des prix hors taxes de l’énergie, notamment en abaissant sensiblement les taxes énergétiques. Si le présent rapport n’a pas vocation à entrer dans le détail de ces mesures, il en montre l’ampleur et examine les lignes d’action envisageables.

Dans le cadre de leurs efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les pays recourent davantage à la tarification du carbone par le biais de taxes ou de systèmes d’échange de quotas d’émission, mécanismes qui ont été appliqués dans un nombre croissant de pays et de secteurs en 2021.

En 2021, plus de 40 % des émissions de GES ont été soumises à un prix du carbone, contre 32 % en 2018. Parallèlement, le prix moyen du carbone découlant des systèmes d’échange de quotas d’émission et des taxes carbone a plus que doublé pour s’établir à 4 EUR par tonne d’équivalent CO2. Ce rapport montre que les pays adaptent leurs stratégies de réduction des émissions à leur situation particulière, certains faisant davantage appel à la tarification du carbone que d’autres. Même si cette tarification n’est pas au centre de la politique climatique dans tous les pays, il apparaît que les prix du carbone ont augmenté dans 47 des 71 pays examinés dans ce rapport.

Les écarts croissants en ce qui concerne le degré auquel les pays recourent à la tarification du carbone font ressortir l’importance que revêtent de meilleures données et analyses pour pouvoir brosser un tableau plus complet des stratégies nationales d’atténuation du changement climatique, au-delà de la tarification du carbone. Le Forum inclusif sur les approches d’atténuation des émissions de carbone de l’OCDE a pour ambition de contribuer à produire les données factuelles et les analyses nécessaires.

Le présent rapport fait également les constats suivants :

  • Dans les 71 pays examinés, des prix nets positifs du carbone s’appliquent à plus de 40 % des émissions de GES, contre 32 % en 2018. Cette progression résulte de l’instauration ou de l’élargissement de mécanismes de tarification explicite du carbone dans plusieurs pays, dont l’Allemagne, le Canada et la Chine.

  • Le prix du carbone a connu des évolutions divergentes selon les pays en 2021, et il a continué d’augmenter dans les pays qui affichaient déjà les prix nets les plus élevés en 2018. Dans ces pays, son renchérissement est surtout le fait de la hausse des prix explicites du carbone (c’est-à-dire des taxes carbone et du prix des quotas dans les systèmes d’échange de quotas d’émission). À l’inverse, dans les pays où le prix net du carbone était relativement faible en 2018, il a moins souvent augmenté.

    • Les prix des quotas d’émission ont progressé dans les pays soumis au système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE), mais aussi au Canada, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni. En 2021, l’Allemagne a ajouté au SEQE-UE un SEQE national qui cible les combustibles de chauffage et les carburants de transport.

    • La divergence des prix du carbone s’explique aussi par l’évolution des taxes carbone : certains pays ont instauré de telles taxes (le Luxembourg en 2021 et l’Islande en 2020 pour les gaz fluorés), d’autres ont relevé leur taux (la Finlande, l’Irlande, l’Islande et la Norvège, par exemple) et d’autres encore ont entrepris de supprimer progressivement les exonérations (dont le Portugal et la Suède)

    • Au Canada, l’augmentation des prix explicites du carbone découle du durcissement des normes nationales minimales de tarification du modèle fédéral, rendu exécutoire par l’entrée en vigueur du système de filet de sécurité fédéral concernant la pollution par le carbone.

  • Les prix nets du carbone restent souvent faibles en dehors des secteurs des transports et des bâtiments, mais on constate une forte hétérogénéité entre les pays. L’industrie et le secteur de l’électricité ne font pas exception de ce point de vue.

    • Là où les émissions de l’industrie et du secteur de l’électricité font l’objet d’une tarification, c’est généralement au travers d’un système d’échange de quotas d’émission ou d’une taxe carbone. Si de nombreuses émissions échappent encore à toute tarification, les prix du carbone payés par certains émetteurs atteignent désormais un niveau non négligeable, en particulier en Europe.

    • Les prix nets du carbone les plus élevés résultent généralement de taxes relativement fortes sur les carburants routiers.

    • Les prix du carbone négatifs pour cause de subventions aux énergies fossiles se rencontrent le plus souvent dans le secteur de l’agriculture et de la pêche, et à un degré moindre dans ceux du transport routier et des bâtiments.

  • Le relèvement des prix effectifs du carbone pourrait à la fois procurer des recettes non négligeables et faire baisser les émissions. Les recettes tirées de la tarification du carbone peuvent avoir leur importance dans la transition vers la neutralité GES, vu que celle-ci induira des coûts d’ajustement considérables.

    • D’après les estimations présentées dans ce rapport, les pays pourraient être en mesure de lever l’équivalent d’environ 2.2 % du PIB en moyenne en portant les prix du carbone à 120 EUR par tonne de CO2, taux qui correspond à l’estimation moyenne du prix du carbone qu’il serait nécessaire d’atteindre en 2030.

    • Le montant des recettes susceptibles de découler d’une hausse des prix effectifs du carbone au niveau de référence de 120 EUR par tonne varie sensiblement d’un pays à l’autre. Dans certains d’entre eux (Costa Rica, Danemark, Ouganda et Suisse), les recettes ainsi levées représenteraient moins de 0.3 % du PIB, alors que dans d’autres (Afrique du Sud, Inde et Kirghizistan, par exemple), elles pourraient être supérieures à 5 % du PIB.

À partir de ces constats, le présent rapport propose des éclairages pour aider les décideurs publics à relever le défi de la transition vers la neutralité GES.

Pour surmonter les obstacles à une transition vers la neutralité GES adaptée à leur situation, les pays doivent faire appel à un large éventail de leviers d’action. Le fait de relever progressivement les prix du carbone tout en supprimant peu à peu les subventions aux énergies fossiles peut aider les pays à mettre en œuvre une politique climatique plus ambitieuse, efficace et efficiente. Cette ligne d’action sera particulièrement efficace lorsqu’elle s’accompagnera de mesures qui soutiennent l’offre de technologies et d’infrastructures peu ou pas émettrices de carbone.

Le présent rapport montre que les pays progressent, mais qu’il reste beaucoup de chemin à parcourir pour exploiter pleinement le potentiel de la tarification du carbone.

  • Près de 60 % des émissions de GES font l’objet d’une tarification du carbone nulle ou négative une fois déduites les subventions aux énergies fossiles.

  • Lorsque le prix du carbone est positif, il est rarement assez élevé pour être le moteur d’une véritable transition vers la neutralité GES.

  • Les mesures prises en réaction à la récente flambée des prix de l’énergie se sont soldées par une baisse sensible des prix nets du carbone.

Le récent choc sur les prix de l’énergie a conduit les gouvernements à abaisser fortement de nombreuses taxes énergétiques, qui ont ainsi bien souvent diminué de 50 EUR par tonne de CO2, voire plus. À long terme, la poursuite de la transition vers la neutralité GES contribuera à réduire la dépendance à l’égard des énergies fossiles et donc, potentiellement, l’exposition aux chocs futurs sur les prix de l’énergie. À court et moyen termes, il est tout à fait souhaitable de protéger les plus vulnérables de l’impact du renchérissement de l’énergie, condition nécessaire pour susciter l’adhésion à la transition bas carbone.

Il est compréhensible que la réaction immédiate des gouvernements ait consisté à agir sur les prix, mais si de nouvelles mesures s’imposent, il serait possible de mieux les cibler en recourant au soutien des revenus et en s’employant à rendre les solutions bas carbone plus largement disponibles.

La tarification du carbone progresse. Néanmoins, les stratégies de lutte contre le changement climatique appliquées par les pouvoirs publics et la rigueur de leur action en la matière varient toujours selon les juridictions. Les disparités en termes de recours à la tarification du carbone se sont creusées entre 2018 et 2021. Elles peuvent aviver les préoccupations pour la compétitivité et la crainte de transferts d’émissions dans les secteurs fortement émetteurs de carbone et exposés aux échanges internationaux.

Indépendamment du degré auquel ils recourent aujourd’hui à la tarification du carbone, les pays devront sans doute actionner toute une série de leviers d’action qui se renforcent mutuellement pour parvenir à la neutralité GES au milieu du siècle. Le dosage de ces leviers variera d’un pays à l’autre, en fonction de la situation particulière de chacun.

Dans tous les pays, il est nécessaire de donner confiance dans le fait que la transition vers la neutralité GES peut être réalisée sans sacrifier la cohésion sociale. Cet enjeu prend un relief particulier dans un contexte où les prix de l’énergie s’envolent sous l’effet de chocs externes. L’expérience récente montre qu’il est indispensable de protéger les plus vulnérables de cette flambée des prix pour que la politique climatique recueille durablement l’adhésion.

Face à un choc qui affecte les prix de l’énergie, les mesures qui visent à modérer ceux-ci, par exemple en allégeant la fiscalité, peuvent être indiquées pour atténuer les difficultés dans l’immédiat. En revanche, si les prix restent aussi élevés, c’est en évoluant vers des mesures ciblées de soutien des revenus que les pouvoirs publics préserveront les signaux de prix et renforceront l’incitation à réduire la consommation d’énergies fossiles.

Disclaimers

Ce document, ainsi que les données et cartes qu’il peut comprendre, sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de tout territoire, ville ou région.

Les données statistiques concernant Israël sont fournies par et sous la responsabilité des autorités israéliennes compétentes. L’utilisation de ces données par l’OCDE est sans préjudice du statut des hauteurs du Golan, de Jérusalem-Est et des colonies de peuplement israéliennes en Cisjordanie aux termes du droit international.

Note de la République de Türkiye
Les informations figurant dans ce document qui font référence à « Chypre » concernent la partie méridionale de l’Ile. Il n’y a pas d’autorité unique représentant à la fois les Chypriotes turcs et grecs sur l’Ile. La Türkiye reconnaît la République Turque de Chypre Nord (RTCN). Jusqu’à ce qu'une solution durable et équitable soit trouvée dans le cadre des Nations Unies, la Türkiye maintiendra sa position sur la « question chypriote ».

Note de tous les États de l’Union européenne membres de l’OCDE et de l’Union européenne
La République de Chypre est reconnue par tous les membres des Nations Unies sauf la Türkiye. Les informations figurant dans ce document concernent la zone sous le contrôle effectif du gouvernement de la République de Chypre.

Crédits photo : Couverture © Bene_A/Shutterstock.com.

Les corrigenda des publications sont disponibles sur : www.oecd.org/fr/apropos/editionsocde/corrigendadepublicationsdelocde.htm.

© OCDE 2022

L’utilisation de ce contenu, qu’il soit numérique ou imprimé, est régie par les conditions d’utilisation suivantes : https://www.oecd.org/fr/conditionsdutilisation.