Tableaux de bord des services rendus aux citoyens

Ce chapitre propose, pour la première fois, un ensemble de tableaux de bord conçus pour offrir une vue d’ensemble des performances des pays de l’OCDE sur le plan de l’accessibilité, de la réactivité et de la qualité des services assurés aux citoyens. Ces tableaux n’ont pas pour objet de désigner tel ou tel pays comme assurant, de façon globale, les meilleurs services publics. Ils proposent une synthèse des performances des systèmes nationaux pour une sélection d’indicateurs inspirés du cadre d’analyse « Au service des citoyens » mis en place par l’OCDE, afin de mettre en évidence d’éventuelles pistes de réformes prioritaires. Ces tableaux de bord récapitulatifs abordent trois domaines : la santé, l’éducation et la justice. Pour chacun de ces trois domaines, une sélection d’indicateurs clés est présentée. Cette sélection se fonde sur trois critères principaux : 1) la pertinence pour l’action publique ; 2) la disponibilité de données ; et 3) l’interprétabilité des données (c’est-à-dire l’absence d’ambiguïté quant au sens à donner – amélioration ou dégradation des performances – à l’augmentation ou à la baisse d’une valeur).

Cadre OCDE « Au service des citoyens »

Accessibilité

Réactivité

Qualité

Accessibilité financière

Courtoisie et traitement

Efficacité de la prestation des services et des réalisations

Proximité géographique

Correspondance entre les services et les besoins spécifiques

Cohérence de la prestation des services et des réalisations

Accès à l’information

Rapidité

Sécurité/sûreté

Dans la plupart de ces tableaux de bord, les pays sont classés en trois groupes : 1) le tiers supérieur ; 2) le tiers intermédiaire ; et 3) : le tiers inférieur. De plus, le rang exact de chaque pays est indiqué dans la case correspondante, afin de donner des indications sur sa proximité éventuelle avec un autre groupe. Ce rang dépend, pour chaque indicateur, du nombre de pays pour lesquels on dispose de données (le maximum étant 35, quand tous les pays sont couverts) ; les pays sont ensuite classés dans l’un des trois groupes précités. Quand on dispose d’indications sur l’évolution du score, des flèches indiquent si le score absolu du pays au regard de l’indicateur (et non pas nécessairement son rang global) s’améliore (↑), se dégrade (↓) ou reste constant (→). On trouvera plus de précisions sur les indicateurs et les méthodologies au chapitre 14, « Au service des citoyens ».

Dans de nombreux pays, les services de santé et d’éducation sont dispensés à la fois par des prestataires publics et par des prestataires privés, même s’il est fréquent qu’une grande partie des services assurés au sein des établissements hospitaliers ou scolaires privés soient financés par des fonds publics qui leur assurent ainsi une certaine accessibilité. Les données actuellement disponibles dans bon nombre de pays ne font pas toujours clairement la distinction entre les établissements hospitaliers ou scolaires publics et privés, ce qui limite les possibilités de comparaison entre les performances du secteur public et du secteur privé. Il s’agit là d’une piste importante en termes de données et de recherches, sur laquelle il conviendra de se pencher dans les années qui viennent. En outre, on a accès à moins de données comparatives pour les indicateurs relatifs à l’accessibilité et à la réactivité du système de santé et du système judiciaire, soit parce que les instruments d’enquête ne sont pas harmonisés, soit parce que l’accès à des données administratives comparables est limité.

Accessibilité

L’accessibilité des services de santé, d’éducation et de justice peut dépendre des moyens financiers des usagers (quand ces services ne sont pas pris en charge par la sphère publique), de leur proximité géographique et de leur aptitude à accéder à des renseignements suffisants et pertinents en vue d’obtenir ces services.

La plupart des pays de l’OCDE ont mis en place une prise en charge universelle (ou quasi-universelle) des coûts de santé pour un éventail essentiel de services, sauf les États-Unis, la Grèce et la Pologne, dont une partie non négligeable de la population n’est toujours pas couverte. Le niveau de protection des individus face aux coûts liés à la maladie dépend non seulement de leur couverture par une assurance santé, mais aussi de l’éventail des biens et services couverts, et du degré de couverture. Les systèmes de santé des pays de l’OCDE offrent des degrés de couverture très divers dans le domaine des biens et services de santé. Dans des pays comme la France et le Royaume-Uni, les dépenses de santé à la charge directe des ménages (biens et services de santé confondus) représentent un poids relativement faible au sein de leur consommation totale. Certains autres pays, comme la Corée ou le Mexique, sont parvenus à une couverture universelle (ou quasi-universelle), mais seule une portion relativement faible du coût des différents biens et services de santé est couverte, ce qui laisse une partie importante du coût à la charge des ménages.

Les besoins de soins de santé non satisfaits signalés par les citoyens dans le cadre d’enquêtes en population constituent un bon critère pour évaluer si certains groupes de population connaissent des problèmes d’accès aux soins. Les données ici présentées relativement à ces besoins non satisfaits proviennent de deux sources principales : 1) l’édition 2015 de l’enquête de l’Union européenne sur le revenu et les conditions de vie (EU-SILC), qui couvre 25 pays de l’OCDE situés en Europe ; et 2) l’édition 2016 de l’enquête internationale du Commonwealth Fund sur les politiques de santé, qui couvre 11 pays de l’OCDE européens et non européens (indications non prises en compte dans les tableaux de bord mais figurant au chapitre 14, « Au service des citoyens »). Les citoyens de pays tels que l’Autriche et la Slovénie signalent moins de besoins de santé non satisfaits que les citoyens des pays dépourvus de couverture universelle des soins de santé, tels que les États-Unis, la Grèce ou la Pologne.

Dans tous les pays de l’OCDE, le système éducatif assure à tous les élèves âgés de 5 à 14 ans l’accès à des établissements publics d’enseignement primaire et secondaire. L’accès aux établissements d’éducation de la petite enfance et d’enseignement supérieur dépend davantage des moyens financiers des ménages. Les dépenses privées (y compris les frais à la charge des ménages) liées à l’éducation de la petite enfance et à l’enseignement supérieur sont relativement faibles dans des pays comme la Belgique, le Danemark et la Norvège, alors qu’elles sont plus élevées en Australie et aux États-Unis. La plupart des pays ont mis en place des prêts et des bourses au mérite ou sur critères sociaux afin de favoriser l’accès à l’enseignement supérieur. C’est en Nouvelle-Zélande que le nombre d’étudiants accédant à l’enseignement supérieur est le plus élevé (sous l’effet, dans une large mesure, de la présence de nombreux étudiants internationaux), et c’est au Luxembourg et au Mexique qu’il est le plus faible. Une proportion importante de jeunes Luxembourgeois étudient à l’étranger, ce qui réduit le taux d’accès à l’enseignement supérieur, surtout au niveau de la licence.

L’accès à la justice dépend avant tout des moyens financiers des justiciables, mais aussi de leur connaissance des procédures à suivre et des mesures à prendre face à un problème d’ordre juridique. Selon les données recueillies par le World Justice Project, c’est en Allemagne, en Nouvelle-Zélande et aux Pays-Bas que les entraves d’ordre financier à l’accès à la justice sont les plus faibles, et aux États-Unis, au Mexique et en Turquie qu’elles sont les plus fortes. L’accès aux mécanismes alternatifs de règlement des litiges est également déterminant pour permettre aux individus de régler leurs différends en dehors des tribunaux. Selon les indicateurs du World Justice Project, c’est en Corée, au Danemark et en Norvège que les mécanismes alternatifs de règlement des litiges sont les plus accessibles et efficaces, alors que des efforts supplémentaires pourraient être nécessaires pour promouvoir et accompagner le règlement extrajudiciaire des litiges dans des pays comme l’Italie ou le Mexique. Dans son chapitre 14 (« Au service des citoyens »), cette édition présente, pour la première fois, des données d’enquête plus détaillées pour 13 pays de l’OCDE, notamment sur les entraves d’ordre financier au règlement des différends et sur la sensibilisation des citoyens et leur accès à l’information s’agissant d’entreprendre des démarches juridiques et d’obtenir l’assistance correspondante.

Réactivité

Les principaux éléments permettant de mesurer la réactivité varient selon les services publics. En matière de santé et de justice, la rapidité des interventions et des procédures revêt une importance particulière. En matière d’éducation, en revanche, on évalue généralement la réactivité en examinant dans quelle mesure les élèves bénéficient de supports et de méthodes pédagogiques adaptés.

Les données recueillies pour 11 pays de l’OCDE montrent que le délai nécessaire pour obtenir un rendez-vous chez un médecin généraliste ou spécialiste est relativement court aux Pays-Bas, et plus long en Norvège et au Canada. En France et en Allemagne, le délai nécessaire pour obtenir un rendez-vous est relativement long pour les médecins généralistes, mais court pour les spécialistes ; en effet, dans ces deux pays, moins de 5 % des personnes interrogées déclarent avoir dû attendre au moins deux mois avant d’obtenir un rendez-vous avec un spécialiste, alors que ce pourcentage s’établit, en moyenne, à 14 % pour les 11 pays de l’OCDE ayant participé à l’enquête, et à plus de 25 % pour le Canada et la Norvège.

Le délai nécessaire à la résolution d’une affaire civile, commerciale ou administrative en première instance dépend, entre autres facteurs, du nombre d’affaires à traiter au cours d’une année donnée, de la tradition juridique et de l’ampleur du recours aux technologies numériques par les tribunaux. D’après les données dont on dispose, c’est en Grèce et en Italie que les délais sont les plus longs pour résoudre les affaires de première instance. La durée estimative des procédures était, pour une affaire administrative, équivalente à plus de 4 ans en Grèce et à plus de 2.5 ans en Italie. À l’inverse, elle était inférieure à 4 mois en Slovénie et en Suède. Le délai de résolution des affaires de première instance s’est beaucoup amélioré par rapport à 2012 au Danemark, en Estonie, en Hongrie, en Slovénie et en Suède. À l’inverse, il s’est dégradé en Finlande, en République tchèque et en République slovaque.

Dans tous les pays de l’OCDE, les systèmes éducatifs s’emploient à répondre aux besoins d’élèves présentant des profils divers sur le plan du milieu socioéconomique. La réactivité des systèmes éducatifs peut s’apprécier à trois échelons différents : au niveau du système éducatif, à celui des établissements d’enseignement et à celui des enseignants. Globalement, l’Australie, le Canada, les États-Unis et la Suède obtiennent de bons résultats sur le plan des supports disponibles dans les établissements d’enseignement, de la fourniture d’une aide aux devoirs dans les établissements et du recours à des méthodes d’enseignement s’adaptant à l’élève. En Australie, au Canada et aux États-Unis, environ 60 % des élèves indiquent que leurs enseignants fournissent une aide individuelle aux élèves qui ont du mal à comprendre un sujet ou un cours, contre 48 % des élèves en moyenne de la zone OCDE.

Qualité

Améliorer la qualité de service et les réalisations pour l’ensemble des groupes de population dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la justice représente une piste d’action prioritaire pour tous les pays de l’OCDE.

Dans le domaine de la santé, la qualité de service peut s’évaluer, au moins en partie, à l’aune des taux de létalité pour les trois principales causes de décès dans les pays de l’OCDE : les crises cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et le cancer. Si les écarts constatés entre les pays et entre les périodes au niveau des taux de létalité pour ces trois grandes causes de décès dépendent, en grande partie, de déterminants non médicaux (tels que des facteurs liés au mode de vie comme la consommation de tabac ou l’alimentation), la qualité des soins de santé peut jouer un rôle important dans la réalisation d’un diagnostic plus précoce et dans la fourniture d’un traitement efficace. Par rapport à 2000, la plupart des pays ont réalisé des progrès considérables sur le plan de la prévention, du diagnostic précoce et du traitement de ces trois grandes causes de décès. En Grèce, en Hongrie et en Turquie, les taux de létalité pour les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux restent élevés, mais ils sont en train de baisser. En France, les taux de létalité pour les crises cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux figurent parmi les plus bas de la zone OCDE, mais les taux de létalité pour le cancer du sein (et d’autres types de cancers) restent élevés, et sont en train d’augmenter.

Tous les trois ans, l’enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) évalue les résultats des élèves de 15 ans en sciences, en mathématiques et en compréhension de l’écrit (l’accent ayant été mis sur les sciences lors de la dernière édition, qui remonte à 2015). En Allemagne, au Canada, en Corée, en Estonie, en Finlande, au Japon, aux Pays-Bas et en Slovénie, les élèves obtiennent de relativement bons résultats dans les trois matières. À l’inverse, au Chili, en Grèce, en Hongrie, en Islande, au Luxembourg, au Mexique, en République slovaque et en Turquie, ils obtiennent des scores faibles dans les trois matières. Sur la dernière décennie, le score PISA moyen en sciences a nettement progressé en Israël, en Norvège et au Portugal, avec un gain de plus de 10 points ; à l’inverse, il s’est dégradé en Finlande, en Hongrie et en République slovaque, avec une chute supérieure à 25 points.

Chaque année, le World Justice Project publie son indice de l’état de droit (RuLi), qui présente un ensemble de grands éléments de mesure sur l’efficacité et l’équité de la mise en œuvre des principes de l’état de droit, à la lumière d’enquêtes en population et d’enquêtes auprès d’experts. Parmi les principaux éléments de mesure de cet indice, on trouve des indicateurs sur la bonne mise en application de la justice civile, sur l’absence d’influence indue des pouvoirs publics sur la justice civile et sur le non-recours à la violence en cas de grief personnel. Ce sont les pays nordiques (Danemark, Finlande, Norvège et Suède) ainsi que l’Autriche qui obtiennent les meilleurs scores pour ces trois indicateurs, alors que des pays comme le Mexique et la Turquie présentent une marge de progression.

Tableau de bord 1. Accessibilité

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* En Australie, aux États-Unis, en Nouvelle-Zélande et au Royaume-Uni, le niveau élevé des dépenses privées consacrées à l’éducation est associé à l’existence d’une proportion importante d’élèves bénéficiant de prêts ou de bourses. Dans ces quatre pays, plus de 80 % des étudiants de l’enseignement supérieur bénéficient de prêts, de bourses sur critères sociaux et/ou de bourses au mérite fournis par des sources publiques (voir le graphique 14.12 du Panorama des administrations publiques 2017).

Pour la couverture des soins de santé, le groupement a été effectué comme suit : tiers supérieur (couverture des soins de santé comprise entre 95 et 100 %) ; tiers intermédiaire (couverture des soins de santé comprise entre 90 et 95 %) ; et tiers inférieur (couverture des soins de santé inférieure à 90 %). La France émet des réserves sur l’utilisation d’une seule source, le World Justice Project, qui repose sur un nombre limité de répondants et ne permet pas de refléter la situation objective en matière d’accès et de qualité des services judiciaires.

Source : Statistiques de l’OCDE sur la santé (2016) ; OCDE (2016), Regards sur l’éducation ; World Justice Project (indice de l’état de droit 2016)

Tableau de bord 2. Réactivité

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Note : pour les indicateurs relatifs à la rapidité des décisions de justice, on a comparé l’année 2014 à l’année 2010. Les données relatives au Portugal portent sur 2012, et non 2014. S’agissant des données relatives aux procédures administratives, les données relatives au Luxembourg portent sur 2010, et non 2014. Les données relatives au délai de résolution des affaires civiles, commerciales, administratives et autres (première instance) pour l’Autriche, la Grèce et l’Italie portent sur 2012, et non 2014. On ne dispose pas de données sur l’évolution des valeurs pour la Belgique, le Luxembourg, la République tchèque (affaires administratives uniquement) et les Pays-Bas (affaires contentieuses civiles et commerciales). L’indicateur relatif au recours à des méthodes d’enseignement s’adaptant à l’élève correspond à la proportion d’élèves qui indiquent que leurs enseignants fournissent une aide individuelle aux élèves qui ont du mal à comprendre un sujet ou une tâche pour « de nombreuses leçons » ou pour « toutes les leçons ou presque ».

Source : Enquête du Commonwealth Fund sur les politiques de santé (2016) ; OCDE, base de données PISA 2015 ; CEPEJ (2016).

Tableau de bord 3. Qualité

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Notes : Santé : comparaison entre 2004 et 2014 (ou l’année la plus proche pour laquelle on dispose de données). Les flèches signalent une évolution positive ou négative supérieure ou égale à 2 p.p. Éducation : comparaison entre 2006 et 2015. Seules les évolutions statistiquement significatives sont indiquées. Justice : on ne dispose pas de données sur l’évolution des valeurs. La France émet des réserves sur l’utilisation d’une seule source, le World Justice Project, qui repose sur un nombre limité de répondants et ne permet pas de refléter la situation objective en matière d’accès et de qualité des services judiciaires.

Source : Statistiques de l’OCDE sur la santé (2016) ; OCDE, base de données PISA 2015 ; World Justice Project (indice de l’état de droit 2016)