Résumé

L'édition 2023 de la série de l’OCDE sur l’administration fiscale (TAS 2023) continue de mettre en évidence l'ampleur et la complexité de l’administration de l’impôt. Le graphique 0.1 montre que l’ensemble des administrations fiscales qui ont participé à cette édition perçoivent 13 400 milliards EUR de recettes nettes et emploient environ 1.7 million de personnes. Elles s’occupent des dossiers de plus de 900 millions de contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques et à l’impôt sur les sociétés qui ont avec elles plus de 450 millions de communications directes, par téléphone, par messagerie électronique ou par courrier, et plus de 2.3 milliards d’échanges via des canaux en ligne. Les administrations fiscales disposent pour ce faire d’un budget de fonctionnement se chiffrant au total à environ 95 milliards EUR, soit l'équivalent de 0.7 % du montant total des recettes collectées, ce qui reflète leur efficience et leur efficacité.

Les éditions précédentes de cette série, tout comme la présente édition, visent systématiquement à évaluer dans quelle mesure les administrations fiscales ont maintenu et renforcé leur efficience et leur efficacité en cherchant à adopter des approches plus proactives afin d'améliorer la discipline fiscale des contribuables. Cette démarche passe souvent par le recours accru à la technologie afin de répondre aux nouvelles attentes et aux nouveaux besoins des contribuables. Par exemple, les administrations fiscales ont été parmi les premières à se tourner vers l'administration électronique, qui permet le dépôt en ligne des déclarations de revenu, le paiement en ligne et l'établissement de déclarations intégralement ou partiellement pré-remplies. Ces pratiques sont désormais largement répandues, puisque plus de 85 % des personnes physiques et 95 % des entreprises déposent leurs déclarations par voie électronique. Comme le montre le graphique 0.1, les canaux numériques sont majoritairement utilisés pour communiquer avec les contribuables, et le nombre d'administrations qui utilisent ou mettent au point des applications mobiles continue d'augmenter, ainsi que l’illustrent les exemples au chapitre 5.

Pendant la pandémie de COVID-19, la capacité des administrations fiscales à faire usage de la technologie pour gérer leurs relations avec les citoyens et les entreprises ainsi que la longue expérience et les compétences qu’elles ont acquises en matière d’exploitation à grande échelle de vastes séries de données ont conduit de nombreux États à se tourner vers les services fiscaux pour les aider à mettre en place des mesures de soutien de plus large portée. La pandémie a également entraîné une transformation rapide des modèles de fonctionnement, en accélérant de nombreuses pratiques nouvelles et évolutions, porteuses d'avantages durables tant pour les administrations que pour les contribuables. Néanmoins, il importe de rappeler que la mission première d’une administration fiscale est de générer les recettes nécessaires pour financer les services publics. Les éditions précédentes de cette publication pointaient aussi les conséquences de la pandémie de COVID-19 sur les recettes, et le caractère temporaire de ces conséquences témoigne de la résilience et des capacités d'adaptation des administrations fiscales. Par exemple, après une forte hausse du ratio du total des arriérés à la fin de l’exercice en pourcentage des recettes nettes perçues en 2020 - la première année de la pandémie -, ce ratio a baissé entre 2020 et 2021 dans près de 70 % des juridictions étudiées dans ce rapport.

Avec la participation de 58 juridictions représentant environ 90 % du PIB mondial, l'édition 2023 de la série de l’OCDE sur l’administration fiscale donne une vue complète de la situation des administrations fiscales en 2021 de trois manières. Premièrement, des informations comparatives sous la forme d'indicateurs et de données de performance sont réunies dans 135 tableaux, à partir des renseignements recueillis grâce à l’Enquête internationale sur les administrations fiscales (ISORA). Deuxièmement, cette édition utilise également des données tirées de l’Inventaire multipartenaires des initiatives sur l’utilisation de la technologie à des fins fiscales (ITTI) (OCDE et al, 2023[1]) qui livre des informations sur les outils technologiques et les solutions de transformation numérique mises en œuvre par les administrations fiscales à l'échelle mondiale. Troisièmement, elle contient plus de 100 exemples d’innovations et de pratiques exemplaires communiqués par 34 administrations fiscales. Ensemble, ces sources de données et ces exemples mettent en lumière la variété des sujets traités par les administrations fiscales, et peuvent aider ces dernières à déterminer les domaines dans lesquels de nouvelles améliorations sont possibles et à mieux faire comprendre au grand public la nature changeante de l’administration de l’impôt à l’échelle mondiale.

Avec une utilisation de plus en plus sophistiquée de la technologie, les administrations fiscales réfléchissent désormais à la transformation numérique de leur modèle d'activité, souvent en s'appuyant sur les enseignements tirés de la pandémie, de façon à ancrer la discipline fiscale et à alléger les formalités. Cette transformation numérique est décrite dans le rapport de l’OCDE sur l’administration fiscale 3.0 (OCDE, 2020[2]), et de nombreuses administrations fiscales s'inspirent des concepts et idées qu’il contient pour piloter leur stratégie de transformation numérique.

Le rapport sur l’administration fiscale 3.0 recense une série de composantes essentielles qui sont au cœur de la transformation numérique. Au moyen d'un ensemble de données et d’exemples, l'édition 2023 de la série sur l’administration fiscale analyse les progrès considérables accomplis pour mettre en place ces composantes ainsi que certaines difficultés rencontrées. Malgré les défis que pose la transformation numérique, elle procure des avantages substantiels en termes de discipline fiscale et de réduction des contraintes pour les contribuables, et ce rapport met en lumière les importantes avancées réalisées par les administrations fiscales pour concrétiser ces avantages.

Favoriser une attitude positive des contribuables à l’égard de la discipline fiscale, en faisant en sorte que le respect de leurs obligations fiscales soit aussi facile et fluide que possible, demeure au cœur des activités déployées par l’administration fiscale pour collecter des recettes destinées à financer les services publics essentiels. Voici quelques-unes des initiatives prises par les administrations fiscales :

  • Création d’une administration fiscale disponible 24 heures sur 24 : Les administrations fiscales s’efforcent en permanence d’améliorer leurs processus d’interactions, que les échanges aient lieu en ligne, en personne ou par téléphone, afin de faciliter aux contribuables l’entrée en contact avec leurs services. Par exemple, plus de 60 % des administrations fiscales utilisent des assistants virtuels ou numériques pour répondre aux questions des contribuables et favorisent l’utilisation des services en libre accès, soit une augmentation de près de 30 points de pourcentage par rapport à 2018. Ces efforts servent également à aider les contribuables à mieux comprendre leurs obligations ainsi que les moyens de s’y conformer. Ils sont de plus en plus complétés par des actions volontaristes prenant la forme de campagnes d’éducation des contribuables, y compris en recourant à un large éventail de médias sociaux.

  • Rôle de l’identité et de la vérification numériques : Les administrations fiscales assurent de plus en plus de services par des moyens numériques, et l’identité et la vérification numériques prennent de plus en plus d’importance. Les administrations fiscales mettent à profit leur expertise et les séries de données dont elles disposent pour donner aux contribuables accès non seulement à leurs propres services, mais aussi à d’autres systèmes des administrations publiques.

  • Décentralisation des services de l'administration fiscale : L’intégration des services et des processus dans les systèmes traditionnels utilisés tant par les contribuables dans leur vie quotidienne que par les entreprises est une tendance qui s’affirme dans l’ensemble des administrations fiscales. Si elle concourt à l’amélioration de la discipline fiscale, elle contribue aussi à alléger la charge administrative pesant sur les entrepreneurs et à leur dégager du temps qu’ils peuvent consacrer à d'autres activités, notamment le développement de leur entreprise. Ces modes de collaboration devenant plus répandus et plus sophistiqués, les administrations fiscales commencent à adopter des approches stratégiques pour gérer le recours à des prestataires de services et faciliter le travail de ces derniers, notamment en autorisant l’accès aux systèmes internes de l’administration fiscale par le biais d’interfaces de programmation d’applications (API).

Il existe depuis de nombreuses années des dispositifs conçus d’emblée pour favoriser le respect de leurs obligations fiscales par les salariés soumis à l'impôt sur le revenu des personnes physiques : ils prennent la forme de retenues à la source et de déclarations établies par les employeurs, souvent intégrées dans le logiciel de gestion de la paie. Ces dispositifs systémiques, adoptés par la quasi-totalité des administrations fiscales, ont contribué à optimiser le respect de la législation pour cette fraction importante de la base d’imposition. Le fait que les données soient de plus en plus accessibles et partagées permet à présent de les étendre à d’autres sources de revenu et à d’autres catégories de contribuables, notamment en proposant des déclarations pré-remplies pour l’impôt sur les bénéfices des sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée dans certains cas.

Les technologies numériques offrent aussi aux administrations fiscales la possibilité d’aborder la gestion des risques dans une optique plus préventive. En s’efforçant d’intervenir à des stades plus précoces, elles peuvent prévenir le non-respect de leurs obligations fiscales par les contribuables au lieu de découvrir les manquements après le dépôt des déclarations fiscales. C’est ce que l’on peut déceler à travers :

  • L’utilisation et l’exploitation sophistiquées de données : Elles ont alimenté une forte intensification de l’utilisation des outils et techniques d’analyse destinés à améliorer la gestion des risques et à favoriser le respect des obligations fiscales dès le stade de la conception du système. Près de 95 % des administrations fiscales déclarent se servir de la science des données et des outils d’analyse pour exploiter les données électroniques fournies par des tierces parties, y compris par d’autres administrations fiscales, ainsi que les données électroniques générées par leurs propres services, pour orienter leurs activités d’examen de la conformité. Cela représente une progression de plus de 20 points de pourcentage par rapport à 2018.

  • L’utilisation de technologies de pointe : Plus de 80 % des administrations fiscales indiquent recourir à des techniques d’avant-garde, ou avoir engagé la phase de mise en œuvre préalable à l’utilisation future de ces techniques, pour exploiter les données selon des modalités réduisant la nécessité d’une intervention humaine. Bien que l’on en soit encore en général à un stade précoce de l’évolution, l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique produisent déjà des gains d’efficience qui libèrent des ressources susceptibles d’être redéployées vers d’autres domaines.

  • Des interactions plus personnalisées : La puissance de l’analyse des données offre aux administrations fiscales la possibilité d’appréhender de façon plus ciblée leurs échanges avec les contribuables. Ceux-ci peuvent passer par des canaux s’adressant à un grand nombre de personnes ou à des groupes spécifiques de contribuables tels que les grandes entreprises ou les particuliers fortunés. Les exemples fournis par les administrations fiscales font désormais apparaître une tendance croissante à la segmentation dans d’autres domaines, aidant à donner forme à des actions et des interventions plus ciblées tant sur le plan de la discipline fiscale que des services, y compris au niveau individuel.

La transformation des modèles d'activité suppose de disposer de moyens financiers importants et pérennes. La mise en œuvre de la transformation numérique est freinée par les contraintes budgétaires qui continuent de peser sur les administrations fiscales. Si la majorité d’entre elles déclarent accroître leurs dépenses de fonctionnement en valeur absolue, cette information n’est peut-être à prendre au pied de la lettre car elles se voient souvent investies de compétences élargies et soumises aux pressions résultant du changement technologique et de l’évolution de la structure de leur personnel. En outre, une part importante des budgets est absorbée par les coûts salariaux, qui représentent en moyenne 73 % des dépenses d’exploitation annuelles. Le montant des dépenses de fonctionnement et d’investissement consacrées aux technologies de l’information et des communications est aussi très variable. Si ces variations trouvent souvent leur origine dans des différences entre les approches suivies en matière d’approvisionnement et de stratégie, se pose aussi la question de savoir si, dans certains cas, les niveaux de dépenses ne sont pas un peu faibles pour répondre à la demande de services plus sophistiqués et à la transformation numérique en cours.

Une difficulté supplémentaire signalée par les administrations fiscales tient à la nécessité de préparer les agents en exercice à relever les défis futurs, ainsi qu’à recruter un personnel hautement qualifié sur un marché du travail extrêmement concurrentiel, une situation qui a conduit à adopter des innovations en matière de recrutement et de formation du personnel.

Parallèlement aux nombreux progrès accomplis à l'échelle nationale, le présent rapport démontre que la coopération internationale et le partage des connaissances entre administrations fiscales comptent plus que jamais à l’heure où les pays subissent d’importants changements et où la transformation numérique de l’économie transcende de plus en plus les frontières nationales.

La tradition de coopération entre administrations fiscales est établie de longue date ; par exemple, elles œuvrent de concert à la mise en œuvre effective des principales mesures issues du Projet BEPS de l’OCDE et du G20 et de la Norme commune de déclaration, ainsi qu’à l’élaboration d’un Programme international multilatéral de l’OCDE pour le respect des obligations fiscales dans le cadre duquel contribuables et administrations fiscales s’emploient, en coopération et dans un cadre multilatéral, pratiquement en temps réel, à évaluer les risques et à trouver des parades face aux principaux risques fiscaux internationaux.

Cette tradition de collaboration efficace demeurera essentielle, à l’heure où les administrations fiscales mettent en commun leurs connaissances pour accélérer leur transformation individuelle, mais aussi pour relever les défis posés par l’essor des activités économiques transfrontalières. Cet esprit de coopération sera également essentiel pour permettre aux administrations fiscales d’assurer la mise en œuvre efficace de nouvelles initiatives, telles que la « solution reposant sur deux piliers pour relever les défis fiscaux soulevés par la transformation numérique de l’économie » (OCDE, 2021[3]).

Bibliographie

[1] Banque asiatique de développement, M. (dir. pub.) (2022), A Comparative Analysis of Tax Administration in Asia and the Pacific: Sixth Edition, https://doi.org/10.22617/TCS220571-2.

[2] Crandall, W., E. Gavin et A. Masters (2021), ISORA 2018: Understanding Revenue Administration, http://www.imf.org/en/Publications/Departmental-Papers-Policy-Papers/Issues/2021/11/03/Understanding-Revenue-Administration-464865 (consulté le 29 mars 2022).

[3] Díaz de Sarralde Miguez, S. et D. Morán (2022), ), Innovation, Digitalization and Technology Index (INDITEC): A tool for benchmarking Tax Administrations at the international level (Based on data from ISORA 2020 Survey), http://www.ciat.org/Biblioteca/DocumentosdeTrabajo/2022/WP-02-22-Sarralde-Moran.pdf (consulté le 17 mai 2023).

[4] OCDE (2023), Inventory of Tax Technology Initiatives, https://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/tax-technology-tools-and-digital-solutions/ (consulté le 17 mai 2023).

[5] OCDE (2019), Tax Administration 2019: Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, https://dx.doi.org/10.1787/74d162b6-en.

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