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La migration est un phénomène profondément enraciné au Burkina Faso. Le pays a toujours été un carrefour de populations et de marchandises circulant entre le golfe de Guinée, au Sud, et le désert du Sahara et la mer Méditerranée, au Nord. Si les flux se sont intensifiés au cours de la période de colonisation du pays par la France, ils ont atteint des niveaux sans précédent lorsque la Côte d’Ivoire a adopté une politique migratoire relativement ouverte dans le but de stimuler ses exportations agricoles. Depuis 1970, le nombre d’émigrés burkinabè s’est maintenu à au moins 9 % de la population du pays. Le conflit survenu en Côte d’Ivoire au début des années 2000, qui a sévi pendant près de dix ans, a contribué à modifier les flux migratoires entre les deux pays, et bon nombre de Burkinabè, dont certains étaient nés en Côte d’Ivoire, ont commencé à émigrer, ou à revenir, au Burkina Faso.
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Les migrations ont toujours tenu une place importante dans l’histoire du Burkina Faso. Soulignons toutefois la forte progression du phénomène d’émigration vers la Côte d’Ivoire à compter des années 60, dans le sillage de la politique migratoire relativement ouverte adoptée par ce pays. En 1970, la population émigrée burkinabè représentait plus de 14 % de la population totale du Burkina Faso. Mais le conflit en Côte d’Ivoire a contribué à un ralentissement des flux migratoires ; nombre d’émigrés sont rentrés au pays dans les années 2000 et de nombreux immigrés, pour l’essentiel des personnes nées en Côte d’Ivoire de parents nés au Burkina Faso, ont rejoint le Burkina Faso. En 2015, la population émigrée était estimée à quelque 8 à 9 % de la population totale, contre 4 % pour les immigrés. Si la création du Conseil supérieur des Burkinabè de l’étranger (CSBE) en 1993 a représenté un premier pas important vers la reconnaissance de la valeur de la diaspora, l’adoption début 2017 d’une stratégie migratoire a marqué pour le pays un tournant décisif en matière de migrations.
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Le Burkina Faso ne tire pas suffisamment parti du potentiel de développement offert par les niveaux élevés d’émigration et d’immigration qui caractérisent le pays. Le projet Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD) a été mis en oeuvre au Burkina Faso entre 2013 et 2017 afin d’étudier, au travers d’une analyse quantitative et qualitative, la relation bilatérale entre les migrations et les politiques publiques dans quatre secteurs clés – marché de l’emploi, agriculture, éducation et investissement et services financiers. Le présent chapitre propose un aperçu des conclusions du projet, en mettant l’accent sur le potentiel de promotion du développement qu’offrent les migrations dans bon nombre de leurs dimensions (émigration, transferts de fonds, migration de retour et immigration) et en analysant les politiques sectorielles nationales qui en permettront la réalisation.
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Les flux migratoires ont toujours occupé une place importante dans le tissu économique et social du Burkina Faso. Les importants flux d’émigration vers la Côte d’ivoire, des années 60 aux années 90, ont fait place de nos jours à de nouveaux flux d’immigration et de migration de retour. Dans le même temps, l’importante diaspora en place constitue une source non négligeable de transferts de fonds fournissant au pays des capitaux financiers indispensables. Ce chapitre présente un aperçu de la migration au Burkina Faso : ses moteurs et son incidence, qui sont les migrants et où ils sont allés, et ce que nous dit la documentation disponible à propos des répercussions de la migration pour ceux qui restent au pays. Il conclut par une présentation de la politique et du cadre institutionnel qui régissent les migrations au Burkina Faso.
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Afin de fonder empiriquement l’analyse des liens entre politique et migration, le projet Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD) s’attache à recueillir des données au moyen de trois outils : des enquêtes auprès des ménages ; des enquêtes auprès des communautés ; et des entretiens avec des représentants d’organisations publiques, internationales et locales, permettant d’obtenir des informations qualitatives supplémentaires à propos des migrations au Burkina Faso. Ce chapitre explique la méthode d’échantillonnage de l’enquête et décrit les approches statistiques utilisées dans les chapitres suivants pour analyser les effets des migrations, de l’émigration, la migration de retour, les transferts de fonds et l’immigration sur les principaux secteurs ciblés par les politiques. Il comprend une synthèse des résultats d’enquête, y compris des différences entre les régions rurales et urbaines et entre les ménages migrants et non-migrants. Il met en évidence des disparités hommes/femmes, en particulier en ce qui concerne le pays de migration ou d’origine et les raisons du départ, du retour ou de l’arrivée.
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Le Burkina Faso est un pays pauvre et enclavé. En raison des niveaux élevés de pauvreté, des perspectives d’emploi limitées et de sa position géographique, il s’est imposé depuis longtemps comme le centre de flux migratoires. Depuis des décennies, il connaît de forts taux d’émigration, notamment vers la Côte d’Ivoire. En même temps, il est et reste un pays d’immigration. Les répercussions de cette migration sur les ménages et le développement national sont mal comprises. Les différentes dimensions de la migration – émigration, transferts de fonds, migration de retour et immigration – sont susceptibles d’avoir des incidences à la fois positives et négatives sur le bien-être des ménages et les secteurs essentiels de l’économie burkinabè. Le présent chapitre examine les conséquences de la migration en termes de développement dans quatre secteurs : le marché de l’emploi ; l’agriculture ; l’éducation ; et l’investissement et les services financiers.
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Les politiques sectorielles mises en oeuvre dans des domaines clés pour le développement, tels que le marché de l’emploi ; l’agriculture ; l’éducation ; et les investissements et les services financiers, peuvent influer sur les décisions de migration. Les enquêtes Interactions entre politiques publiques, migrations et développement (IPPMD) menées auprès des ménages et des communautés intégraient un large éventail de programmes politiques menés dans ces quatre secteurs dans l’objectif d’identifier quelques-uns des liens existant entre les politiques sectorielles et les migrations. Ce chapitre analyse en quoi les programmes politiques conduits dans ces secteurs au Burkina Faso influencent les décisions d’émigrer, de transférer des fonds, de revenir et de s’intégrer dans le pays.