Résumé

Grandes tendances

Les données préliminaires de 2015 suggèrent que les flux des migrations permanentes ont nettement augmenté pour la deuxième année consécutive dans la zone OCDE. Environ 4.8 millions de personnes ont immigré dans les pays de l’OCDE en 2015, légèrement plus qu’au cours du pic de 2007 et 10 % de plus qu’en 2014.

Les migrations pour raisons familiales et au titre de la libre circulation au sein de l’Union européenne (UE) représentaient chacune un tiers des migrations permanentes vers les pays de l’OCDE. Les migrations en provenance de Roumanie, de Bulgarie, d’Italie et de France ont nettement augmenté en 2014. Un nouveau migrant sur trois vient d’un autre pays de l’OCDE, environ un sur dix vient de Chine et un sur vingt d’Inde.

Les migrations temporaires ont aussi augmenté. En 2014, la mobilité intra-entreprises et le détachement de travailleurs entre les pays de la zone « Union européenne – Association européenne de libre-échange » ont augmenté respectivement de 17 % et 38 %. Le recrutement international de travailleurs saisonniers a augmenté dans plusieurs pays.

En 2015, les demandes d’asile dans les pays de l’OCDE ont atteint le chiffre record de 1.65 million, dont environ 1.3 million ont été enregistrées dans les pays européens de l’OCDE. Près de 25 % des demandes ont été effectuées par des Syriens, et 16 % par des Afghans. L’Allemagne a enregistré 440 000 demandes d’asile en 2015 et plus d’un million de personnes ont procédé à un pré-enregistrement. La Suède a reçu le plus grand nombre de demandes en proportion de sa population (1.6 %).

Aucun changement majeur en matière de politique migratoire n’a eu lieu en 2015-16 dans la zone OCDE. Le Canada a toutefois introduit en 2015 un nouveau système de gestion des demandes dans le cadre des programmes d’immigration économique. En Europe, « l’Agenda européen en matière de migration » a été adopté et mis en œuvre en 2015 en complément d’autres mesures visant à traiter les causes profondes et les conséquences des récents flux de migration, ainsi qu’à reformer le régime d’asile européen commun. En 2016, la Commission européenne a proposé des amendements à la directive sur la « carte bleue » portant sur les travailleurs hautement qualifiés et sur les conditions de détachement des travailleurs au sein de l’UE.

Sur la période 2011-15, le taux d’emploi des immigrés est resté stable ou a légèrement baissé dans de nombreux pays de l’OCDE, mais le taux de chômage des immigrés reste toutefois élevé dans la plupart d’entre eux. En moyenne, 60 % des immigrés de la zone OCDE ont un emploi (64.9 % pour les personnes nées dans le pays) avec un taux de chômage de 9.3 % (7.3 % pour les personnes nées dans le pays).

Dans les pays les plus touchés par la crise des réfugiés, les mesures d’intégration pour les demandeurs d’asile et les réfugiés ont été renforcées. Les dépenses en éducation et en formation linguistique ont été augmentées en Allemagne, en Autriche, en Finlande, en Norvège et en Suède. Plusieurs pays ont réduit les délais d’entrée sur le marché du travail et ont facilité un accès anticipé aux cours de langues et à l’évaluation des compétences.

Incidence des migrations au niveau local

Les études qui ont analysé l’incidence de l’immigration dans les pays d’accueil se sont pour la plupart intéressées à l’échelon national bien que l’impact soit principalement ressenti au niveau local. Les effets sur les différents domaines (marché du travail, éducation, santé, lodgement, etc.) ne peuvent être généralisés. En effet, l’impact local dépend des caractéristiques socio-économiques spécifiques des migrants. Par exemple, les données disponibles suggèrent que les immigrés ont moins tendance à faire appel aux services de santé que les personnes nées dans le pays, mais utilisent davantage les transports publics. À l’école, les enfants d’immigrés, surtout ceux récemment arrivés, nécessitent plus de soutien et représentent donc une dépense plus importante par habitant, en raison notamment des formations linguistiques.

L’afflux soudain et massif d’immigrés est susceptible d’accentuer les problèmes structurels plus anciens qui pèsent sur les infrastructures locales et l’ajustement à cette pression supplémentaire peut prendre du temps. Reconnaître que l’immigration n’est pas la cause première de ces difficultés est une première étape importante en vue de rapprocher l’opinion publique, souvent négative, des faits empiriques plus nuancés.

Les migrations internationales dans le sillage des chocs environnementaux et géopolitiques

Des mouvements migratoires de grande ampleur, pouvant mettre à rude épreuve les systèmes de protection et de gestion des migrations légales, sont souvent associés aux chocs environnementaux et géopolitiques.

Les expériences passées montrent que les pays de l’OCDE utilisent des mesures temporaires pour venir en aide aux personnes provenant de pays en guerre ou en situation de catastrophe naturelle. Bien que certains pays de l’OCDE mettent en œuvre des programmes de réinstallation de grande envergure dans des contextes de chocs géopolitiques, la plupart d’entre eux recourent davantage à une protection temporaire et subsidiaire en cas d’afflux de demandeurs d’asile, y compris dans le cadre de la crise actuelle. Les filières alternatives, telles que l’immigration de travail, familiale et des études à l’étranger ou les visas humanitaires et les programmes de parrainage privé, ne font pas partie des réponses habituelles pour faire face à une augmentation des flux, y compris dans la crise actuelle des réfugiés.

La présente édition des Perspectives souligne que la coopération internationale ne va pas forcément de soi ; que les crises prolongées accroissent les tensions entre la nécessité de trouver des solutions durables et la préférence générale pour les mesures de protection à court terme ; que la sélection, qui est un trait commun à la plupart des systèmes migratoires, doit être repensée dans le contexte du cadre de protection internationale.

Principales conclusions

Les migrations ont augmenté et atteignent leur niveau antérieur à la crise

  • Les flux migratoires permanents vers les pays de l’OCDE ont représenté 4.3 millions d’entrées en 2014 (+4 % par rapport à 2013). Selon les données préliminaires, ces flux ont augmenté de 10 % en 2015.

  • La population née à l’étranger était de 120 millions de personnes dans les pays de l’OCDE en 2014.

  • En 2015, les pays de l’OCDE ont enregistré 1.65 million de demandes d’asile, le double des niveaux de 2014 et de 1992.

  • En 2013, environ trois millions d’étudiants en mobilité internationale étaient inscrits dans des pays de l’OCDE, dont 23 % de Chinois.

L’incidence des migrations au niveau local ne devrait pas être sous-estimée

  • Dans tous les pays de l’OCDE, les immigrés sont surreprésentés dans les zones urbaines.

  • L’impact sur les infrastructures et les services publics varie selon les caractéristiques propres des immigrés par rapport à celles des personnes nées dans le pays et, en fonction des services et des infrastructures considérés. Les infrastructures locales peuvent être mises sous pression par des flux importants. Bien que l’immigration puisse exacerber des problèmes structurels, notamment dans les domaines de l’éducation et du logement, elle ne constitue, en général, pas la cause principale de ces difficultés.

Les politiques migratoires pourraient apporter des réponses plus adaptées aux chocs géopolitiques et environnementaux

  • Les instruments internationaux existants en matière de gestion des migrations associées à des crises sont peu nombreux.

  • En dépit des défis pratiques liés à la mise en œuvre de filières alternatives pour les réfugiés, celles-ci pourraient concerner un nombre potentiellement élevé de bénéficiaires, comme cela a été démontré lors de la crise syrienne.

  • Dans la zone OCDE, 18 200 permis de travail ont été délivrés à des Syriens (près de 2 millions de Syriens âgés de 18 à 59 ans ont été déplacés dans les pays frontaliers) au cours des cinq dernières années, tandis que quelques 15 300 jeunes Syriens ont bénéficié d’un visa étudiant pour étudier dans la zone OCDE (moins de 10 % des étudiants universitaires syriens déplacés) et plus de 72 000 Syriens ont fait l’objet d’un regroupement avec des membres de leur famille.