Complications chirurgicales

Le problème de la sécurité des patients continue d’occuper une place centrale dans les politiques de santé et le débat public. Selon les données dont on dispose, plus de 15 % des dépenses et de l’activité hospitalières dans les pays de l’OCDE seraient imputables au traitement des failles de sécurité, dont beaucoup sont évitables (OCDE, 2017a et OCDE, 2017b). Aux États-Unis, l’amélioration systématique de la sécurité des soins aurait permis d’économiser 28 milliards USD entre 2010 et 2015 (AHRQ, 2016).

Une comparaison rigoureuse des performances entre pairs est indispensable pour améliorer la situation. Pour ce faire, on peut distinguer deux types d’incidents en lien avec la sécurité des patients : les événements sentinelles qui ne devraient jamais se produire, comme l’oubli d’un corps étranger à la fin d’une intervention chirurgicale ; et les événements indésirables, comme la septicémie postopératoire, qui ne peut jamais être totalement évitée compte tenu du caractère risqué de certaines interventions, une hausse du taux global de complications pouvant toutefois être le signe d’une défaillance systémique.

Le graphique 6.24 présente un « événement sentinelle »: le taux de corps étrangers laissés dans l’organisme pendant l’intervention. Les facteurs de risque les plus courants à cet égard sont les interventions d’urgence, les modifications imprévues des procédures, l’obésité des patients et des changements dans l’équipe chirurgicale. Les mesures préventives consistent à compter les instruments, à procéder à une exploration méthodique de la plaie et à assurer une communication efficace entre les membres de l’équipe chirurgicale.

Le graphique 6.25 présente les taux pour deux événements indésirables apparentés : l’embolie pulmonaire (EP) et la thrombose veineuse profonde (TVP) suite à une arthroplastie de la hanche ou du genou. L’EP et la TVP sont à l’origine de douleurs inutiles et, dans certain cas, de décès, mais peuvent être prévenues par des anticoagulants et d’autres mesures prises avant, pendant et après l’opération. De fortes variations de taux sont observées, avec une variation de de 1 à 20 en TVP. Les variations des taux de TVP peuvent être influencées par les différences dans les pratiques de diagnostic dans les pays, mettant en évidence que le dépistage systématique des ultrasons peut augmenter de façon significative la détection de la TVP (Kodadek, 2016).

Le graphique 6.26 présente les taux d’un autre événement indésirable, la septicémie après une opération de l’abdomen. De même, les septicémies consécutives à des actes chirurgicaux, qui peuvent entraîner des dysfonctionnements organiques et la mort, peuvent dans de nombreux cas être évitées par l’antibiothérapie prophylactique, les techniques chirurgicales stériles et des soins postopératoires de qualité.

La partie gauche des graphiques 6.24, 6.25 et 6.26 présente les taux des trois complications postopératoires respectives établis sur la base de l’« admission pour chirurgie », soit l’admission à l’hôpital pour intervention. La partie droite présente les taux basés sur l’« admission pour chirurgie » ainsi que toutes les réadmissions ultérieures à l’hôpital dans les 30 jours suivant l’intervention, que ce soit dans le même hôpital ou dans un autre.

La prudence s’impose lorsqu’il s’agit d’évaluer dans quelle mesure ces indicateurs reflètent fidèlement les disparités entre pays en matière de sécurité des patients et non les différences dans la façon dont les pays enregistrent, codent et calculent les taux d’incidents indésirables (voir l’encadré Définition et comparabilité).

Définition et comparabilité

Deux méthodes de calcul des complications chirurgicales sont présentées. La méthode fondée sur les admissions pour chirurgie utilise des données non couplées pour calculer le nombre de sorties d’hôpital assorties d’un code CIM de complication dans un champ de diagnostic secondaire, divisé par le nombre total de sorties de patients de 15 ans et plus. La méthode fondée sur l’ensemble des admissions ne se limite pas aux seules admissions pour chirurgie, mais englobe toutes les réadmissions ultérieures qui lui sont liées, indépendamment de l’hôpital concerné, dans un délai de 30 jours. La seconde méthode est réputée plus rigoureuse et est moins affectée par les variations de durée du séjour et des pratiques de transfert hospitalier, mais elle requiert un identifiant de patient unique et des données couplées qui ne sont pas disponibles dans tous les pays. Bien que la méthode basée sur l’admission utilisant toutes les données non couplées renforce l’identification des complications valides, l’impact sur les taux d’indicateur n’est pas clair étant donné qu’une seule admission par patient est comptée lorsque plusieurs entrées admissibles sont identifiées.

Un défi de taille en matière de comparaison internationale des indicateurs de sécurité pour les patients concerne la qualité des données sous-jacentes. Des différences dans la façon dont les pays enregistrent les diagnostics et les procédures et définissent les admissions à l’hôpital peuvent influer sur le calcul des taux. Dans certains cas, un taux élevé d’événements indésirables tiendra à un système d’enregistrement de sécurité des patients et à une culture de la sécurité du patient plus développés, et non à une moindre qualité des soins. L’harmonisation des déclarations d’événements liés à la sécurité des patients dans les différents pays s’impose ; il existe en outre de nombreuses possibilités d’améliorer les données au sein des programmes nationaux axés sur la sécurité des patients.

Références

AHRQ – Agency for Healthcare Research and Quality (2016), « National Scorecard on Rates of Hospital-Acquired Conditions 2010 to 2015: Interim Data from National Efforts to Make Health Care Safer », www.ahrq.gov/sites/default/files/wysiwyg/professionals/quality-patientsafety/pfp/2015-natlscorecard -hac-rates.eps (consulté le 26/01/2017).

Kodadek, L.M. et E.R. Haut (2016), « Screening and Diagnosis of VTE: The More You Look, The More You Find? », Current Trauma Reports, vol. 2, n° 1, pp. 29-34.

OCDE (2017a), Tackling Wasteful Spending on Health, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/9789264266414-en.

OCDE (2017b), The Economics of Patient Safety: Strengthening a value-based approach to reducing patient harm at national level, OCDE, Paris, www.OCDE.org/els/health-systems/The-economics-of-patient-safety-March-2017.eps.

Graphique 6.24. Corps étrangers laissés dans l’organisme pendant une opération, 2015 (ou année la plus proche)
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Note : Étant donné les faibles occurrences, les intervalles de confiance à 95% ont été calculés pour tous les pays, représentés par les surfaces grises.

Source : Statistiques de l’OCDE sur la santé 2017.

 https://doi.org/10.1787/888933608276

Graphique 6.25. Embolie pulmonaire ou thrombose veineuse profonde après une arthroplastie de la hanche ou du genou, 2015 (ou année la plus proche)
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Source : Statistiques de l’OCDE sur la santé 2017.

 https://doi.org/10.1787/888933608295

Graphique 6.26. Septicémie consécutive à une chirurgie abdominale, 2015 (ou année la plus proche)
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Source : Statistiques de l’OCDE sur la santé 2017.

 https://doi.org/10.1787/888933608314