Allemagne

La croissance économique devrait rester vigoureuse, le dynamisme du marché du travail et la faiblesse des cours du pétrole soutenant la consommation privée, tandis que les taux d’intérêt peu élevés et les besoins de logement des réfugiés stimulent l’investissement résidentiel. L’investissement productif va s’affermir quelque peu à mesure que l’utilisation des capacités augmentera et que l’emploi progressera. La demande d’exportations allemandes de la part des économies de marché émergentes et des pays de la zone euro devrait progressivement se redresser. Les réfugiés entreront peu à peu sur le marché du travail. En raison de la vitalité de la croissance de la demande intérieure, l’excédent de la balance courante régressera, mais en restant néanmoins relativement important.

L’orientation de la politique budgétaire est modérément expansionniste, à juste titre car cela dégage une marge de dépense pour améliorer l’intégration des migrants et renforcer les politiques actives du marché du travail en direction de ceux qui peinent à trouver un emploi. En outre, l’offre de structures d’enseignement et d’accueil pour les jeunes enfants, d’enseignement primaire à temps plein et d’infrastructures de transport reste insuffisante. Il faudrait développer le soutien aux jeunes issus de milieux socioéconomiques modestes au sein du système scolaire. De telles mesures contribueraient à rendre plus inclusive l’expansion économique en cours, et elles constituent un investissement pour une croissance future plus forte.

La productivité n’a guère progressé ces dernières années et elle est relativement faible dans le secteur des services. Accélérer l’accès des réfugiés au marché du travail et continuer de développer leurs compétences permettraient d’accroître la production, de réduire la dépendance par rapport aux aides publiques et d’accélérer l’intégration des réfugiés dans la société. Des dispositions visant à alléger l’imposition du second apporteur de revenu supprimeraient les obstacles au travail des femmes à temps plein, améliorant leur accès à des emplois et à des carrières plus productifs. Des réformes permettant une levée des obstacles à l’entrée et à la concurrence dans le secteur des services professionnels et des industries de réseaux renforceraient la productivité et l’investissement et pourraient réduire l’excédent de la balance courante.

La demande intérieure soutient l’activité mais le décalage des compétences bride la productivité

L’activité a fortement progressé au premier trimestre, en particulier dans la construction, qui a bénéficié d’un hiver exceptionnellement peu rigoureux. Les salaires et l’emploi ont augmenté, alors que la faiblesse des prix du pétrole a pesé sur les prix à la consommation, stimulant la consommation privée des ménages. L’emploi public a augmenté pour répondre aux besoins des réfugiés. Quelque 1 million de réfugiés sont arrivés en 2015 (soit 1 ¼ pour cent de la population). La plupart d’entre eux n’ont pas encore commencé à chercher du travail puisque les procédures de demande d’asile et les premières mesures prises pour leur formation sont encore en cours. Le chômage reste à des niveaux historiquement bas. Cela étant, près de la moitié des chômeurs sont à la recherche d’un travail depuis plus d’un an alors que parallèlement, l’insuffisance de main-d’œuvre possédant certaines qualifications contribue à augmenter le nombre d’emplois non pourvus. Les obstacles fiscaux et le manque de structures de garde d’enfants et de dispositifs d’enseignement à plein temps entravent l’emploi des femmes à temps plein, limitant leurs perspectives de carrière et leur productivité.

Construction et Exportations
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1. Prix des appartements occupés par leur propriétaire dans 7 villes.

2. Construction de nouveaux logements.

3. Moyenne de la croissance de janvier et février 2016 pour le premier trimestre 2016.

Source : Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 99 ; base de données analytique des prix du logement de l’OCDE ; et Statistisches Bundesamt.

 https://doi.org/10.1787/888933372495

L’augmentation du revenu des ménages et le grand nombre de réfugiés ont stimulé la demande de logements, entrainant une hausse des loyers et des prix immobiliers dans les centres urbains et dopant la construction. Néanmoins, les prêts aux ménages restent limités. Les commandes étrangères de biens d’équipement, dans lesquels le secteur manufacturier allemand est spécialisé, se sont tassées. Les exportations à destination de la Chine, qui absorbe 7 % des exportations allemandes de marchandises, ont reculé.

Emploi, revenu et inflation
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 https://doi.org/10.1787/888933373663

L’immigration et l’augmentation des dépenses publiques stimulent la demande intérieure

De nombreux réfugiés vont commencer à entrer sur le marché du travail au deuxième semestre de 2016, une fois leur demande d’asile validée. Dépourvus de compétences linguistiques en allemand et n’ayant pas, pour la plupart, de diplômes officiels, nombre d’entre eux ne trouveront pas d’emploi rapidement. Le gouvernement a fait le point sur les compétences des migrants, élargi leurs possibilités de formation et facilité leur accès au système éducatif. Il prévoit d’assouplir les obstacles juridiques à la recherche d’emploi pour les demandeurs d’asile. Compte tenu de la jeunesse de beaucoup de migrants, ces mesures se révéleront très payantes à long terme.

Marché du travail et salaires réels
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1. Personnes âgées de 15 à 74 ans. D’après l’enquête allemande sur la population active.

2. Offres d'emploi non satisfaites en pourcentage de l'emploi total.

3. Salaire nominal moyen par employé. Projection à partir du premier trimestre 2016.

4. Indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH). L'IPCH sous-jacent ne tient pas compte des prix de l'énergie, de l'alimentation, de l'alcool et du tabac.

Source : Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 99 ; et Statistisches Bundesamt.

 https://doi.org/10.1787/888933372501

Les dépenses publiques consacrées à l’accueil et à l’intégration des migrants devraient augmenter de ¼ pour cent du PIB en 2016 et en 2017. Les dépenses affectées aux allocations et aux abattements fiscaux pour enfant à charge ainsi qu’aux prestations au titre de la dépendance augmenteront à hauteur de 0.2 % du PIB. Les abattements fiscaux pour enfant à charge n’ont guère d’impact sur l’offre d’emploi ou sur la réduction de la pauvreté, alors que les allocations complémentaires versées pour les enfants de ménages à faible revenu réduisent le risque de pauvreté. Les dépenses publiques consacrées aux investissements dans les infrastructures de transport, les réseaux à large bande, l’efficacité énergétique, le logement, les dispositifs de garde d’enfants ainsi que les universités et autres institutions de recherche progresseront également à hauteur de 0.2 % du PIB. L’offre de garde d’enfants progresse, permettant de concilier vie professionnelle et vie de famille, mais des carences subsistent et, dans la plupart des écoles primaires, les enfants continuent à n’avoir classe que le matin. L’État fédéral a par ailleurs accru les transferts aux collectivités locales à des fins d’investissement et envisage de créer une société fédérale des autoroutes et des grands axes routiers à laquelle reviendraient les recettes tirées des péages. La plupart des dépenses supplémentaires rendront la croissance plus inclusive.

La demande intérieure sera le principal moteur de la croissance

La croissance économique devrait rester vigoureuse, portée par la demande privée des ménages et par la hausse des dépenses publiques. La forte demande intérieure fera quelque peu augmenter les prix à la consommation, dès lors que l’impact de la baisse des prix du pétrole se dissipera et que les salaires progresseront plus fortement que la productivité. Le chômage devrait augmenter légèrement. Les échanges mondiaux et les investissements dans les principaux partenaires commerciaux devraient rester en demi-teinte, pesant sur les exportations. Par ailleurs, l’euro s’est apprécié et une hausse importante des salaires réduira la compétitivité de l’Allemagne. En dépit de l’accroissement des dépenses, l’excédent des finances publiques devrait perdurer en raison de l’importante augmentation des recettes fiscales et de la diminution du coût du service de la dette.

Un net ralentissement de l’activité dans les économies de marché émergentes et l’atonie prolongée de la demande dans la zone euro pèseraient sur les exportations et les investissements. L’économie allemande orientée vers les exportations pâtirait particulièrement d’une montée des tensions géopolitiques. Une sortie du Royaume-Uni hors de la zone euro amplifierait aussi les incertitudes entourant les perspectives relatives aux échanges et à l’investissement. S’ils se matérialisaient, ces risques pourraient se répercuter sur la confiance des consommateurs et sur les marchés de capitaux. Le recul des prix du pétrole stimulerait la consommation des ménages et la rentabilité des entreprises, mais pourrait aussi contribuer à créer des turbulences sur les marchés de capitaux mondiaux, dont les conséquences pourraient être aggravées par la faiblesse des ratios de levier des banques systémiques. À l’inverse, des mesures visant à mettre en œuvre les réformes nécessaires à l’achèvement du marché unique dans l’Union européenne et à l’instauration d’une union bancaire étendue dans la zone euro pourraient stimuler les exportations et renforcer l’attrait de l’Allemagne aux yeux des investisseurs. L’adoption de politiques permettant de faire face aux enjeux intérieurs de long terme, tenant notamment au vieillissement de la population et aux objectifs à long terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, pourraient doper les investissements à court terme.