2. Revenu et patrimoine

Le revenu disponible ajusté net moyen des ménages par personne s'établissait aux alentours de 28 000 USD en 2017 dans les pays de l'OCDE considérés dans leur ensemble. Cet indicateur repose sur une mesure tirée du système de comptabilité nationale (SCN) et correspond au revenu après impôts et transferts courants, ainsi qu'aux prestations en nature fournies aux ménages sous forme de services, gratuitement ou à un prix subventionné, par les pouvoirs publics et les institutions à but non lucratif (pour en savoir plus, veuillez consulter l'Encadré 2.1). C'est au Mexique et en Lettonie que cet indicateur était le plus bas (environ 17 000 USD), et aux États-Unis et au Luxembourg qu'il était le plus élevé (supérieur à 42 000 USD). Depuis 2010, le revenu disponible ajusté net moyen des ménages par personne dans la zone OCDE a augmenté de 6 %, en termes cumulés (Graphique 2.2). Le pays où il a progressé le plus fortement depuis 2010 est l'Estonie (avec une hausse de 29 % en termes cumulés), suivie par les autres États baltes et la Corée (26-27 %). Dans le même temps, cet indicateur a diminué en Italie et, surtout, en Grèce, où il a chuté de 23 % (c'est-à-dire de 5 500 USD).

Les données relatives à la distribution de la mesure du revenu disponible ajusté des ménages fondée sur le SCN (représentée ci-dessus) sont encore expérimentales, et ne sont disponibles que pour un nombre limité de pays. Néanmoins, des informations sur la distribution du revenu disponible des ménages (un concept de revenu plus limité ne tenant pas compte des transferts sociaux en nature) « équivalent » (c'est-à-dire corrigé au moyen d'une échelle d'équivalence permettant de prendre en compte les économies d'échelle au sein du ménage) sont disponibles dans la Base de données de l'OCDE sur la distribution des revenus, qui repose sur des enquêtes nationales réalisées auprès des ménages et des fichiers administratifs (pour en savoir plus, voir l'Encadré 2.1). Ces données laissent à penser qu'en moyenne, dans les pays de l'OCDE, le revenu du quintile supérieur de la distribution est 5.4 fois plus élevé que celui du quintile inférieur (Graphique 2.3). C'est dans certains pays d'Europe centrale et orientale (tels que la République slovaque, la République tchèque et la Slovénie) que les inégalités sont les plus faibles, ainsi qu'en Islande, au Danemark, en Finlande et en Belgique, où le rapport interquintile n'est jamais supérieur à 4. À l'inverse, au Chili, au Mexique et aux États-Unis, les individus du quintile supérieur de la distribution des revenus ont des revenus 8 à 10 fois supérieurs à ceux du quintile inférieur. Par rapport à 2010, le rapport interquintile a été peu ou prou stable en moyenne dans les pays de l'OCDE, même s'il a diminué de 1.2 point de pourcentage en Estonie et au Mexique, et de près de 1 point au Chili, tandis qu'il a augmenté de presque 1.8 point en Lituanie.

En moyenne, 12 % des habitants des pays de l'OCDE sont en situation de pauvreté monétaire relative, définie par un revenu disponible inférieur à la moitié de la médiane nationale (Graphique 2.4). C'est en Islande, en République tchèque et au Danemark que cette proportion est la plus basse (inférieure à 6 %), et en Israël, aux États-Unis, en Corée et en Turquie qu'elle est la plus élevée (supérieure à 17 %). Par rapport à 2010, le taux de pauvreté monétaire est resté peu ou prou stable dans la majorité des pays de l'OCDE. Néanmoins, ce taux a augmenté de 4 points de pourcentage en Lettonie et en Lituanie, et diminué de 2 points de pourcentage au Mexique, au Chili et en Australie. Ces évolutions du taux de pauvreté monétaire relative correspondent aux variations du revenu médian national en glissement annuel – autrement dit, dans les pays où le revenu national a rapidement augmenté (comme la Lettonie et la Lituanie), le seuil de pauvreté s'est élevé en parallèle, tandis que dans les pays où le revenu national a diminué (tels que la Grèce et l'Italie), le seuil de pauvreté a fait de même. Les variations du taux de pauvreté monétaire ancré à une année donnée (2005, par exemple) sont plus prononcées et concernent davantage de pays (OCDE, 2015[1]).

Une perspective différente sur les difficultés économiques auxquelles sont confrontés les ménages est offerte par les données (autodéclarées) relatives aux personnes qui éprouvent des difficultés à joindre les deux bouts. D'après cette mesure, qui n'est disponible que pour les pays européens, 21 % des personnes ont des difficultés, voire de grandes difficultés, à joindre les deux bouts en moyenne (Graphique 2.5). Ce taux est nettement supérieur au pourcentage de personnes considérées comme pauvres, à l'aune du seuil de pauvreté monétaire relative (Graphique 2.4), l'écart entre ces deux mesures allant de moins de 1 point de pourcentage en Finlande à 60 points de pourcentage en Grèce. Par rapport à 2010, la proportion de personnes qui éprouvent des difficultés à joindre les deux bouts a diminué de près de 7 points de pourcentage en moyenne dans les pays européens de l'OCDE, les reculs les plus marqués (supérieurs à 20 points) ayant été enregistrés en Lettonie et en Hongrie. À l'inverse, cet écart s'est creusé de près de 16 points de pourcentage en Grèce.

Le patrimoine des ménages est la différence entre l'ensemble des actifs financiers et non financiers (tels que les logements, les terrains, le numéraire et les dépôts, les actions et autres titres de participation) détenus par les ménages et l'ensemble de leurs engagements financiers (tels que les prêts hypothécaires et les crédits à la consommation). Cette mesure est présentée pour le ménage situé exactement au milieu de la distribution (50 % des ménages ont un patrimoine supérieur, et 50 % inférieur), c'est-à-dire à la médiane. En moyenne, le patrimoine médian des ménages est de l'ordre de 162 000 USD dans les pays de l'OCDE. La valeur de ce patrimoine médian varie de moins d'un cinquième de la moyenne de l'OCDE aux Pays-Bas, en Lettonie et au Danemark, à près de trois fois la moyenne de l'OCDE au Luxembourg (Graphique 2.6). Les différences de patrimoine médian entre les pays sont fortement liées au taux de propriétaires à part entière de leur logement (c'est-à-dire à la proportion de propriétaires occupants dont le logement ne donne lieu au remboursement d'aucun emprunt hypothécaire), ainsi qu'à l'existence de prestations de sécurité sociale généreuses en faveur des personnes âgées. Comparé à la situation relative des ménages en termes de revenu disponible moyen (Graphique 2.2), le patrimoine médian des ménages est relativement modeste au Danemark, aux États-Unis et aux Pays-Bas – qui figurent parmi les pays de l'OCDE où la proportion de personnes propriétaires à part entière de leur logement est la plus faible (Balestra et Tonkin, 2018[2]). Depuis 2010, le patrimoine médian a diminué de 4 % (environ 6 000 USD) dans les pays de l'OCDE, en moyenne. Le pays où il a le plus augmenté est le Chili (32 %), essentiellement du fait de la hausse de prix de l'immobilier (Balestra et Tonkin, 2018[2]), suivi par le Canada (16 %), l'Allemagne et les États-Unis (13 %), principalement en raison de l'augmentation du patrimoine financier (Balestra et Tonkin, 2018[2]). La Grèce est le pays qui a connu le recul le plus marqué depuis 2010 (-41 %), suivie par la République slovaque (-25 %), l'Italie et l'Espagne (-19 %), ces baisses étant essentiellement imputables à une diminution de la valeur du patrimoine immobilier (Balestra et Tonkin, 2018[2]).

La distribution du patrimoine des ménages est nettement plus concentrée que celle de leurs revenus. Dans les pays de l'OCDE, en moyenne, les 10 % les plus riches des ménages détiennent 52 % du patrimoine net total des ménages (Graphique 2.7). Cette part varie de 34 % en République slovaque à près de 80 % aux États-Unis. Ces différences tiennent en partie à la précision des mesures relatives à l'extrémité supérieure de la distribution, qui soulèvent des difficultés, en particulier lorsqu'on utilise des enquêtes réalisées auprès des ménages (Balestra et Tonkin, 2018[2]), mais d'autres sources de données (fiscales) tendent également à indiquer que les inégalités de patrimoine sont nettement plus marquées aux États-Unis qu'en Europe (Alvaredo et al., 2017[3]).

Dans les 28 pays de l'OCDE pour lesquels on dispose de données, 36 % des personnes sont en situation de précarité financière (Graphique 2.8), ce qui signifie qu'elles ne sont pas actuellement en situation de pauvreté monétaire, mais risquent de basculer dans cette situation en cas de perte soudaine de revenu, pouvant être liée, par exemple, au chômage, à un éclatement de la famille ou à un handicap. Autrement dit, si leur revenu devait être brutalement réduit à néant, ces personnes ne disposeraient pas d'actifs liquides suffisants pour se maintenir au-dessus du seuil de pauvreté pendant plus de 3 mois (voir l'Encadré 2.1 et la note du graphique ci-après pour en savoir plus). Plus de la moitié de la population se trouve dans une telle situation en Lettonie, en Grèce, en Slovénie, en Nouvelle-Zélande, au Chili et en Pologne. En revanche, 4 % seulement de la population sont en situation de précarité financière en Corée, et moins de 15 % au Japon.

À proprement parler, les profils des différents groupes de population (selon le sexe, l'âge ou le niveau d'éducation des individus) en termes de revenu et de patrimoine ne peuvent être déterminés pour les indicateurs examinés dans ce chapitre, car les données sont collectées par ménage. Les données d'enquête fournissent généralement des informations sur la composition d'un ménage (par sexe et par âge, par exemple), mais pas sur la répartition du revenu et du patrimoine entre les membres de ce ménage. L'hypothèse implicite retenue lors de la présentation des données par ménages est celle d'un partage total et égal des ressources entre tous les membres du ménage. Lorsqu'on travaille avec ces données, les seuls enseignements que l'on puisse en tirer sur les inégalités concernent les caractéristiques moyennes des ménages (par exemple la moyenne des ménages comprenant des personnes de plus de 65 ans et celle des autres ménages), ou les disparités entre les ménages distingués en fonction de leur chef (suivant son sexe, son âge ou son niveau d'éducation). On risque ainsi de sous-estimer ou de surestimer sensiblement l'ampleur des écarts entre ces différents groupes. Des facteurs complexes influent également sur les résultats, tels que la structure démographique du pays considéré, et les types de ménages qui sont les plus nombreux (ainsi, les ménages monoparentaux sont généralement plus défavorisés sur le plan économique que d'autres types de ménages, et leur prévalence varie suivant les pays de l'OCDE). Au-delà des problèmes immédiats de mesure qu'il soulève, le concept de revenu ou de patrimoine « individuel » n'est pas simple à définir, car certaines composantes du revenu et du patrimoine correspondent à l'ensemble du ménage (tels que les transferts sociaux et les impôts, qui sont généralement payés ou reçus suivant la catégorie à laquelle appartient le ménage considéré, déterminé notamment par le nombre d'enfants), tandis que d'autres ont un caractère effectivement individuel. Les inégalités de revenu décrites ci-après se rapportent à des individus regroupés selon leur âge (indépendamment du ménage auquel ils appartiennent), tandis que les inégalités de patrimoine se réfèrent à l'âge et au niveau d'éducation de la personne de référence du ménage.

Comparés aux enfants et aux jeunes (moins de 26 ans) et aux seniors (plus de 50 ans), les personnes d'âge moyen (26 à 50 ans) appartiennent à des ménages dont le revenu disponible équivalent est relativement élevé, et sont moins susceptibles d'être en situation de pauvreté monétaire. Dans les pays de l'OCDE, en moyenne, tant les enfants et les jeunes, d'une part, que les seniors, d'autre part, vivent dans des ménages dont le revenu disponible équivalent est inférieur, de 10 % pour les premiers et de 4 % pour les seconds, au revenu disponible équivalent moyen des ménages qui caractérise les personnes d'âge moyen. Les jeunes et les seniors ont aussi une probabilité supérieure de 35 % et de 20 %, respectivement, à celle des personnes d'âge moyen d'appartenir à un ménage pauvre en termes monétaires.

S'agissant du patrimoine, les ménages dont le chef est âgé de 55 ans ou plus se caractérisent par un patrimoine médian des ménages plus élevé et une probabilité plus faible de se trouver en situation de précarité financière (c'est-à-dire de risquer de basculer dans la pauvreté s'ils devaient renoncer à 3 mois de revenus). Le patrimoine médian des ménages dont le chef est âgé de 55 ou plus est supérieur de 53 % à celui des ménages dont le chef est d'âge moyen (c'est-à-dire compris entre 35 et 54 ans dans ce cas), tandis que le patrimoine médian des ménages dont le chef a moins de 35 ans représente environ un tiers de celui des ménages dont le chef est une personne d'âge moyen. Les ménages dont le chef est un senior se caractérisent également par une probabilité d'être en situation de précarité financière inférieure de 25 % à celle des ménages dont le chef est un individu d'âge moyen, tandis que pour les ménages dont le chef a moins de 35 ans, cette probabilité est supérieure de 7 %.

Le patrimoine médian des ménages dont le chef n'est pas diplômé de l'enseignement supérieur équivaut, en moyenne, à la moitié environ de celui des ménages dont le chef a achevé une formation supérieure. Plus précisément, le patrimoine médian s'établit en moyenne dans la zone OCDE à 91 000 USD pour les ménages dont le chef à un niveau de formation inférieur au deuxième cycle de l'enseignement secondaire, à 130 000 USD pour les ménages dont le chef est uniquement diplômé du deuxième cycle de l'enseignement secondaire ; et à 203 000 USD pour les ménages dont le chef a achevé une formation supérieure.

Les taux de précarité financière varient également en fonction du niveau de formation atteint par le chef du ménage. En moyenne, dans 28 pays de l'OCDE, la proportion de ménages en situation de précarité financière est de 36 % parmi les ménages dont le chef a un niveau de formation inférieur au deuxième cycle de l'enseignement secondaire, de 37 % parmi les ménages dont le chef a uniquement achevé le deuxième cycle de l'enseignement secondaire, et de 26 % parmi les ménages dont le chef est diplômé de l'enseignement supérieur.

Références

[3] Alvaredo, F. et al. (2017), World Inequality Report 2018, Laboratoire sur les inégalités mondiales, Paris, https://wir2018.wid.world/files/download/wir2018-full-report-english.pdf (consulté le 9 octobre 2019).

[2] Balestra, C. et R. Tonkin (2018), « Inequalities in household wealth across OECD countries: Evidence from the OECD Wealth Distribution Database », Documents de travail statistiques de l’OCDE, n° 2018/01, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/7e1bf673-en.

[5] Commission économique des Nations Unies pour l’Europe (2011), Handbook on Household Income Statistics Second Edition, Organisation des Nations Unies, http://unece.org/fileadmin/DAM/stats/publications/Canberra_Group_Handbook_2nd_edition.pdf (consulté le 19 juillet 2019).

[8] OCDE (2018), Comment va la vie ? 2017 : Mesurer le bien-être, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/how_life-2017-fr.

[6] OCDE (2017), Méthodes et concepts, Base de données de l’OCDE sur la distribution des revenus et la pauvreté, http://oe.cd/idd (consulté le 22 novembre 2019).

[1] OCDE (2015), Tous concernés : Pourquoi moins d’inégalité profite à tous, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264235519-fr.

[7] OCDE (2013), OECD Guidelines for Micro Statistics on Household Wealth, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264194878-en.

[4] Stiglitz, J., J. Fitoussi et M. Durand (dir. pub.) (2018), For Good Measure : Advancing Research on Well-being Metrics Beyond GDP, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/9789264307278-en.

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