5. Apporter une assistance pratique aux contribuables

La complexité des systèmes fiscaux et les difficultés à comprendre les obligations fiscales peuvent conduire les contribuables à commettre des erreurs involontaires, voire à relâcher les efforts qu’ils déploient pour s’assurer qu’ils respectent leurs obligations en la matière. Cette situation peut entraîner d’importantes pertes de recettes globales, comme le montrent certains calculs du manque à gagner fiscal (HM Revenue and Customs, 2021[1])1, ainsi que, pour les contribuables, des coûts directs et des coûts d’opportunité susceptibles d’avoir des répercussions sur leur activité économique. Par ailleurs, les contribuables peuvent ne pas percevoir des prestations et crédits d’impôt auxquels ils peuvent prétendre, ce qui peut avoir de graves conséquences pour les plus fragiles d’entre eux. Ces difficultés ont conduit de nombreuses administrations fiscales à développer leurs initiatives en matière d’éducation des contribuables afin d’élargir l’assistance technique qu’elles dispensent en la matière.

Pour apporter une assistance pratique aux contribuables, les administrations fiscales peuvent :

  • Mettre au point des outils et services spécifiques destinés aux contribuables, par exemple des assistants numériques (robots conversationnels), des courriers électroniques, des modules sur les médias sociaux, des simulateurs d’impôts, etc. Pour que leur mise en œuvre soit réussie, il est toutefois nécessaire que les contribuables connaissent l’existence de ces outils et sachent les utiliser correctement, sans oublier que certains contribuables seront désavantagés face au numérique.

  • Proposer une assistance directe aux contribuables, notamment par l’intermédiaire d’agents de l’administration fiscale ou de personnes formées pour apporter une aide individuelle (guichets fiscaux, par exemple).

Ce chapitre aborde ces deux volets, en s’intéressant plus particulièrement à la manière dont les administrations fiscales aident les contribuables à utiliser les nouveaux outils et services numériques ainsi qu’à l’assistance directe qu’elles apportent à celles et ceux qui peuvent avoir des difficultés à se conformer à leurs obligations fiscales ou à bénéficier de certaines prestations et de certains crédits d’impôt.

L’annexe A expose plus en détail 30 des initiatives analysées dans le cadre de la rédaction de ce chapitre.

Ces dernières années, les progrès technologiques ont conduit de nombreuses administrations fiscales à créer de nouveaux outils et services numériques. Une évolution qu’illustrent bien les exemples nationaux cités dans l’édition 2021 de la publication périodique de l’OCDE Tax Administration Series (TAS) (OECD, 2021[2]) ainsi que dans ses éditions précédentes. Ces nouveaux outils et services sont mis en place non seulement pour améliorer l’efficience et l’efficacité de l’administration ainsi que de la perception de l’impôt et d’autres recettes, mais aussi aux fins suivantes :

  • Répondre aux attentes des contribuables en ce qui concerne la communication et les services. Les données reprises dans l’édition 2021 de la publication de l’OCDE TAS montrent que les contribuables privilégient de plus en plus les canaux numériques (site web, courriers électroniques et assistants numériques), au détriment des canaux traditionnels (téléphone, papier et rendez-vous physique) - voir le Tableau 5.1 ci-dessous.

  • Favoriser le libre-service et offrir un accès aux informations 24 h/24, 7 j/7. L’édition 2019 de la publication contient des informations sur divers services et outils en ligne mis en place par les administrations fiscales pour offrir des options en libre-service aux contribuables. Les données de cet ouvrage montrent qu’en 2017, une vaste majorité des administrations proposaient des outils et simulateurs sur leur site web, mais aussi des services en ligne et des boîtes aux lettres numériques, et que certaines d’entre elles avaient déjà mis en place des robots conversationnels. Les informations de l’édition 2019 de TAS sont reprises dans le Tableau 5.2 et le Tableau 5.3.

    Si l’édition 2021 de TAS n’examine pas en détail les services électroniques proposés par les administrations fiscales, elle apporte de nouveaux éléments concernant les robots conversationnels. Ainsi, le nombre d’administrations ayant recours à des robots conversationnels pour répondre aux questions des contribuables et favoriser le libre-service a augmenté de manière significative entre 2017 et 2019, puisqu’elles étaient près de 50 % à déclarer les utiliser en 2019 (OECD, 2021[2])2.

  • Réduire les charges que doivent supporter les contribuables pour se conformer à leurs obligations fiscales. Les administrations fiscales s’inquiètent des charges administratives auxquelles sont soumis les contribuables pour s’acquitter de leurs obligations fiscales. Nombre d’entre elles ont fait de l’allègement de ces contraintes une priorité absolue (Graphique 5.1) et adoptent des approches proactives et innovantes afin de les réduire au minimum. (Le Forum de l’OCDE sur l’administration de l’impôt a publié un modèle de maturité sur la mesure et la gestion des contraintes liées au respect de la législation fiscale visant à aider les administrations fiscales à apprécier leur niveau de maturité et les réformes envisageables (OCDE, 2019[3]).)

La concrétisation de ces objectifs nécessite l’adoption des nouveaux outils et services numériques par les contribuables. Pour y parvenir, les administrations fiscales doivent non seulement faire connaître leur existence (cet aspect est abordé au chapitre 4), mais aussi apprendre aux contribuables comment en tirer profit. Il s’agit notamment de convaincre ceux dont le recours aux technologies à des fins de respect de leurs obligations fiscales peut effrayer ou rebuter. En effet, toute difficulté d’application des nouveaux outils et services, même si elle n’est que supposée, peut conduire les contribuables à refuser de les utiliser, ce qui, par ricochet, peut entraîner un moindre respect spontané des obligations fiscale et un surcoût pour l’administration, obligée de maintenir les outils existants et les services en place.

Dans ce contexte, les administrations fiscales pourraient envisager de s’assurer que les contribuables sont associés à la conception et aux phases de tests des nouveaux services (conception centrée sur le contribuable) et de leur fournir une assistance pratique et des guides d’utilisation lors du lancement de ces nouveaux outils et services. Il peut s’agir de préparer des tutoriels expliquant l’utilisation des nouveaux outils étape par étape ou de fournir des documents exposant les avantages du passage aux nouveaux services, notamment le temps qu’ils permettent de gagner ou les économies qu’ils permettent de réaliser. La section qui suit présente succinctement les dispositifs mis en place par certaines administrations pour accompagner les contribuables dans l’utilisation de nouveaux outils et services numériques.

Il faut trouver le bon ton et les bons canaux pour s’adresser aux différents publics. Il est en outre primordial d’aider les contribuables à utiliser les services en ligne grâce aux nouveaux médias (images, vidéos, réseaux sociaux).

Sergio Mazzei, Responsable de la presse et de la communication au sein de l’administration fiscale italienne

Pour accroître l’utilisation des nouveaux outils et services numériques, il est important d’expliquer aux contribuables pourquoi les utiliser (allègement des formalités et accès plus rapide aux informations) et comment. Ainsi, l’assistance pratique doit être vue comme une étape importante permettant d’assurer une transition en douceur des canaux de contact traditionnels aux canaux numériques. Pour mettre en avant les avantages des nouveaux outils et services, de nombreuses possibilités s’offrent aux administrations ; on trouvera ci-dessous quelques exemples tirés des réponses des administrations fiscales ayant participé à l’enquête qui sous-tend cet ouvrage :

  • La réalisation de vidéos, diffusées notamment sur YouTube ou sur le site web de l’administration fiscale, est une solution fréquemment retenue pour présenter en détail la façon d’utiliser des nouveaux outils et services. L’administration fiscale belge, par exemple, a publié sur YouTube des tutoriels vidéo expliquant l’utilisation de sa nouvelle application de paiement en ligne et en a assuré la promotion via les médias sociaux. Ces vidéos, destinées à quelque 2 millions de contribuables, ont entraîné une augmentation de 332 % des paiements électroniques au cours des deux premiers mois qui ont suivi le lancement de la plateforme (par rapport à la même période de l’année précédente).

    Les vidéos présentent l’avantage d’être accessibles 24 h/24 et 7 j/7, de pouvoir être partagées facilement entre contribuables et, si elles sont relativement courtes, de pouvoir être visionnées rapidement afin de fournir des informations spécifiques répondant à une situation particulière. Toutefois, l’un des inconvénients principaux des vidéos, réside dans le fait qu’elles ne sont pas toujours accessibles aux contribuables ne disposant pas d’une connexion (permanente) à internet. Il peut néanmoins être envisagé de diffuser à la télévision des vidéos explicatives portant sur certains aspects du civisme fiscal (les délais de dépôt ou la mise en place de nouvelles obligations, par exemple), ce qui permettrait de toucher un public plus large.

  • L’élaboration et l’envoi de communications écrites. Les administrations fiscales savent souvent quels sont les catégories de contribuables concernées par de nouveaux outils ou services et ont généralement les moyens de les contacter (notamment parce qu’elles disposent de leur adresse postale ou électronique). Que ce soit par courrier postal, par courrier électronique ou par l’intermédiaire de tiers (bibliothèques, centres de conseils aux citoyens, autorités locales, etc.), le recours à des brochures ou manuels expliquant comment utiliser de nouveaux outils ou services peut donc s’avérer extrêmement efficace lorsqu’il s’agit de toucher un large groupe de contribuables. Lors du lancement de son nouveau portail électronique destiné aux contribuables, l’administration fiscale finlandaise a par exemple fait parvenir une brochure à tous les ménages du pays (voir l’Encadré 5.1). Pour ce qui est des limites posées par les registres fiscaux, elles peuvent être contournées grâce à la collaboration avec d’autres services de l’État (ceux responsables des registres de la population, par exemple).

  • La création de versions de démonstration pouvant être utilisées par les contribuables peut être un moyen efficace de leur en présenter les avantages tout en leur permettant d’essayer de nouveaux outils et services. L’administration fiscale géorgienne a ainsi créé une version de démonstration de son portail web sécurisé destiné aux contribuables. Cette version d’essai permet aux étudiants (entre autres) de se familiariser avec la gamme de services proposés par l’administration fiscale du pays (OCDE, 2019, p. 37[4]).

  • L’intervention d’autres parties prenantes pour former les contribuables à l’utilisation de nouveaux outils et services. Dans le cadre de leurs interactions avec l’administration fiscale, nombre de contribuables font appel à des conseillers ou à des intermédiaires fiscaux. Il arrive par ailleurs qu’un nouveau service nécessite l’utilisation d’un outil tiers, par exemple un logiciel. Dans ce cas, l’administration fiscale peut collaborer avec les fournisseurs du logiciel afin que ces derniers aident les contribuables à prendre en main les nouveaux outils et services.

Les exemples repris dans l’Encadré 5.1 montrent que ces approches peuvent être combinées, souvent dans le cadre d’une stratégie de communication plus large.

Une grande partie des contribuables est probablement déjà habituée à utiliser des outils et services numériques au quotidien. Ils ont donc la capacité et la volonté d’adopter de nouvelles offres de services numériques faites par l’administration fiscale. Toutefois, d’autres contribuables sont plus difficiles à atteindre, ou sont désavantagés face au numérique ; pour ceux-là, il peut être nécessaire d’envisager des approches particulières.

En ce qui concerne les contribuables qui craignent d’utiliser des services numériques, l’administration peut envisager d’adopter des approches progressives permettant aux contribuables de choisir différents canaux de contact pendant un certain temps tout en cherchant à convaincre les contribuables hésitants d’utiliser le nouveau service au travers d’une assistance pratique. Au cours de cette période, l’administration fiscale pourrait mettre en place une stratégie de première réponse numérique, c’est-à-dire utiliser les nouveaux outils et services pour répondre aux demandes des contribuables. Ces derniers auraient ainsi le temps d’en approfondir leur compréhension et de s’y habituer. Par exemple, lorsque l’administration fiscale irlandaise a lancé en 2016 « myAccount », son portail en ligne destiné aux contribuables, elle a donné la priorité au traitement des déclarations en ligne et a mis en avant les avantages d’un service plus rapide pour les contribuables. Elle a également mis en place des équipes chargées d’assurer la promotion de myAccount dans tous les centres des impôts. Celles-ci étaient chargées de faire connaître myAccount aux clients dès leur arrivée dans le centre, de les aider à s’enregistrer et de leur présenter les différents services disponibles.

Pour ce qui est des contribuables qui ne sont pas en mesure d’utiliser les nouveaux outils et services numériques, l’administration fiscale peut envisager (i) d’assurer le maintien des services existants à titre exceptionnel, (ii) de proposer des services personnalisés ou spécialisés, ou (iii) de s’associer à d’autres partenaires pour venir en aide à cette catégorie de contribuables. Au Royaume-Uni, par exemple, HMRC propose un service permettant à une personne d’appeler l’administration pour le compte d’un autre contribuable n’ayant pas la possibilité de se connecter à internet. Le contribuable et la personne qui l’aide doivent se trouver dans la même pièce ; HMRC procède à des vérifications d’identité et s’assure du consentement du contribuable aidé (UK Government, 2021[5]).

S’agissant des contribuables qui ne maîtrisent pas les langues officielles du pays, l’administration fiscale peut envisager de proposer des services téléphoniques, des outils ou des guides d’utilisation dans des langues autres que les langues officielles du pays. L’administration fiscale norvégienne a, par exemple, élaboré des directives internes relatives à l’utilisation de l’anglais et d’autres langues étrangères dans le cadre des communications avec les contribuables, et engagé deux responsables des affaires linguistiques pour en assurer la mise en œuvre. En substance, toutes les demandes verbales et écrites adressées à l’administration en anglais reçoivent désormais une réponse dans cette langue. La plupart des informations écrites que l’administration fiscale norvégienne publie en ligne ou fait parvenir aux contribuables sont disponibles en anglais. En outre, les formulaires et informations générales indispensables à l’enregistrement initial en Norvège sont disponibles dans des langues sélectionnées en fonction de la situation démographique des contribuables. Le Tableau 5.5 montre que de nombreuses autres administrations proposent déjà des services et des documents dans des langues non officielles.

Comme indiqué supra, de nombreuses administrations proposent des outils et services numériques susceptibles de faciliter le respect des règles fiscales et de réduire les charges pesant sur une partie importante des contribuables, en particulier ceux qui ont grandi à l’ère du numérique. Cela étant, toutes les difficultés liées aux obligations fiscales ne peuvent être résolues par la mise en place de nouveaux outils et services numériques. En effet, les contribuables peuvent avoir des questions concernant leurs obligations, en particulier les plus récentes, ne pas connaître les démarches permettant de s’en acquitter ou ne pas savoir comment effectuer une déclaration, ou encore avoir des doutes quant aux prestations et crédits d’impôt auxquels ils peuvent prétendre. En outre, le passage au numérique pouvant conduire une partie de la population à se sentir laissée pour compte, il est important que les administrations fiscales, qui se doivent de répondre aux besoins de tous les citoyens, soient sensibles aux situations de ceux qui se trouvent désavantagés face au numérique.

Une assistance personnalisée peut contribuer à résoudre ces problèmes. Plusieurs administrations ont d’ailleurs indiqué qu’elles proposent, par exemple, des services fiscaux gratuits aux personnes à faible revenu et aux entreprises nouvellement créées (OCDE, 2019, p. 36[4]). En ce qui concerne les contribuables handicapés, la vaste majorité des administrations fiscales déclarent avoir mis en place des dispositions spéciales, comme le montre l’annexe A, tableau A.116 de l’édition 2019 de TAS (OCDE, 2019[4]). Dans le cadre de leurs réflexions sur la mise en place d’initiatives visant à aider les contribuables, les administrations fiscales doivent prendre en considération les éléments suivants : les bénéficiaires de l’assistance, les personnes chargées de l’assurer et le lieu où l’assistance est fournie.

Les contribuables qui peuvent tirer le plus grand profit d’une assistance personnelle directe sont ceux qui connaissent le moins bien le système fiscal et les procédures de conformité qui s’y rapportent (déclaration et paiement) ainsi que ceux qui ne peuvent bénéficier des nouveaux outils et services numériques. Il s’agit notamment des contribuables suivants :

  • les contribuables qui découvrent le système fiscal national, par exemple les entreprises nouvellement créées, les immigrés arrivés récemment (certains d’entre eux peuvent du reste ne pas maîtriser les langues officielles), les primocontribuables, etc. ;

  • les contribuables vulnérables, notamment ceux qui sont confrontés à des difficultés personnelles ou financières ainsi que ceux qui ont des revenus modestes ou sont désavantagés face au numérique ;

  • les contribuables qui vivent dans des zones rurales où l’administration fiscale est peu ou pas du tout accessible.

Nombre d’administrations fiscales ont mis en place des initiatives spécifiques pour aider ces catégories de contribuables. L’administration fiscale sud-africaine (South African Revenue Service , SARS), par exemple, s’est dotée d’unités fiscales mobiles (UFM) lui permettant d’aller au contact des contribuables dans les zones rurales dépourvues de structures organisationnelles. La première UFM a été créée en 2009 et trois autres unités ont été mises en service en 2011. L’initiative a connu un tel succès que l’Afrique du Sud compte désormais 23 UFM. Les études menées en interne par SARS ont montré que si la majorité des contribuables recouraient aux UFM pour l’envoi de leur déclaration, un certain nombre de personnes les utilisaient également pour obtenir un numéro fiscal ou s’immatriculer auprès de l’administration. De façon analogue, l’administration fiscale de Géorgie a mis en place des centres de services fiscaux mobiles permettant aux contribuables de bénéficier de services dans les régions dépourvues de centres des impôts, notamment dans les hautes montagnes (Georgia Revenue Service, 2019[6]) ; l’administration fiscale du Rwanda, pour sa part, a lancé l’initiative IWACU, qui vise à rapprocher les services fiscaux du public par l’intermédiaire d’une unité mobile.

Par ailleurs, l’Afrique du Sud a pris des dispositions particulières en faveur des contribuables sourds en mettant en place des équipes de proximité formées pour aider ces derniers, en langue des signes, à s’acquitter de leurs obligations fiscales. Aux États-Unis, l’administration fiscale américaine (Internal Revenue Services, IRS) a créé les programmes d’assistance fiscale bénévole (Volunteer Income Tax Assistance, VITA) et de conseils fiscaux aux personnes âgées (Tax Counseling for the Elderly, TCE), qui prêtent assistance gratuitement aux contribuables à revenus faibles à modérés, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à celles ayant une maîtrise limitée de la langue anglaise et qui ont besoin d’aide pour remplir leur déclaration d’impôt (United States Internal Revenue Service, 2021[7]).

D’autres administrations aident les contribuables vulnérables dont la situation personnelle complique la gestion de leurs affaires fiscales. L’administration fiscale australienne (Australian Taxation Office, ATO), par exemple, a mis en place « Dispute Assist », un service d’assistance en matière de litiges qui permet aux contribuables vulnérables d’être mis en relation avec des agents expérimentés de l’ATO (des « guides ») chargés de les aiguiller à travers la procédure de règlement des différends (Encadré 5.2 Dans le même ordre d’idées, l’administration fiscale de Tanzanie (Tanzania Revenue Authority, TRA) a mis en place un centre de conseils fiscaux dont la mission est d’aider les contribuables en difficultés qui ne peuvent s’offrir les services de conseillers fiscaux ainsi que de les accompagner dans l’utilisation des services en ligne. D’autres centres de ce type seront créés dans tout le pays.

Il est nécessaire d’informer les contribuables en continu pour favoriser l’utilisation et l’adoption des nouveaux services en ligne, puisque de nouveaux venus apparaissent sur le marché en permanence, mais aussi pour renforcer l’utilisation du système en ligne par les utilisateurs actuels.

Mme Meris Haughton, Directrice de la communication de l’administration fiscale de la Jamaïque

Les micro et petites entreprises, en particulier celles qui sont nouvellement créées et ne disposent pas de fonds suffisants pour s’adjoindre les conseils d’experts, peuvent elles aussi bénéficier d’une assistance directe. Les études montrent que les petits entrepreneurs disposent, dans l’ensemble, de solides connaissances en fiscalité, mais elles révèlent aussi que les évolutions du droit fiscal les conduisent à douter de la manière dont le système s’applique à leurs activités, et que l’obsolescence des connaissances en droit fiscal peut entraîner des manquements aux règles involontaires (Freudenberg et al., 2017[8]). L’assistance directe à ce large groupe de contribuables peut consister à aider ces derniers à remplir leurs déclarations de revenus et autres documents fiscaux pertinents, à aider les entrepreneurs à se familiariser avec les règles fiscales ainsi que les outils et services numériques, et à leur prêter assistance dans la résolution de leurs différends fiscaux. L’administration fiscale de la Suède, par exemple, organise pour les propriétaires de nouvelles entreprises des séminaires et des ateliers en face à face afin de les aider à comprendre leurs droits, leurs responsabilités et leurs obligations en matière fiscale. En Malaisie, l’Inland Revenue Board a mis en place, au travers d’unités d’aide aux entreprises, des équipes visant spécifiquement les PME. Réparties dans les 39 antennes de l’administration du pays, elles organisent des séances d’information en petits groupes de 15 personnes et dispensent également leurs conseils en ligne. L’approche adoptée par l’administration fiscale de la Jamaïque (TAJ) est présentée dans l’Encadré 5.3.

Pour ce qui est d’assurer l’assistance, deux solutions sont possibles : (1) passer par les agents de l’administration fiscale ou (ii) faire appel à des personnes externes à celle-ci. En chargeant ses propres agents d’assurer l’assistance, les administrations fiscales restent maîtres du type et du format choisis pour l’assistance fournie, et décident de la façon dont les choses sont expliquées aux bénéficiaires. Autre avantage : les agents de l’administration peuvent se rendre compte directement des points de tension du système, ce qui peut s’avérer utile pour l’élaboration de nouveaux programmes éducatifs ou d’outils et de services proposés aux contribuables afin d’améliorer encore davantage le respect spontané de leurs obligations fiscales et de réduire les charges qui pèsent sur eux. Le recours à des unités mobiles qui vont au contact des contribuables, mentionné supra, constitue un exemple d’assistance directe assurée par les agents des services fiscaux.

Les administrations fiscales peuvent aussi collaborer avec des organisations de la société civile ou des associations professionnelles pour aider les contribuables qui en ont besoin. Si cette démarche peut nécessiter de dispenser une formation adéquate aux membres de ces organisations et associations, elle présente l’avantage de permettre de proposer une assistance ciblée à des groupes de contribuables spécifiques. Par ailleurs, les administrations fiscales peuvent s’associer à des universités pour dispenser à des professeurs et étudiants une formation spécialisée en assistance fiscale, ou à d’autres bénévoles. Dans tous les cas de figure, l’administration fiscale devrait envisager de mettre en place des mécanismes de retours d’informations afin de mieux cerner les difficultés auxquelles sont confrontés les contribuables.

Les Centres d’assistance comptable et fiscale (NAF, Núcleos de Apoyo Contable y Fiscal), désormais établis dans 14 pays d’Amérique latine, constituent un exemple de coopération entre administrations fiscales et universités. Dans le cadre de cette approche, des étudiants d’université sont formés au moyen de cours préparatoires et de séminaires organisés par des agents de l’administration fiscale avant de pouvoir eux-mêmes venir en aide aux contribuables les plus vulnérables. Le fonctionnement des NAF est détaillé au chapitre 7, Encadré 7.2.

Plusieurs administrations fiscales ont mis en place des programmes bénévoles similaires auxquels les particuliers et les organisations peuvent s’inscrire pour suivre une formation officielle, et au terme de celle-ci, aider les contribuables à remplir leurs obligations fiscales. Aux États-Unis, l’IRS propose les programmes VITA et TCE, dans le cadre desquels des bénévoles certifiés par l’IRS préparent gratuitement les déclarations de revenu de base et les transmettent aux personnes concernées par voie électronique (United States Internal Revenue Service, 2021[7]). En Australie, l’ATO a mis en place le programme bénévole Tax Help, destiné aux contribuables à faible revenu (Australian Taxation Office, 2021[9]). Un programme similaire, administré par l’Agence du revenu du Canada (ARC), est présenté dans l’Encadré 5.4 ci-dessous.

Les contribuables peuvent être aidés dans différents lieux : dans les locaux de l’administration fiscale, à leur domicile ou à leur bureau, dans des établissements partenaires tels que des écoles et universités ou au sein d’autres organes de l’administration. Les visites directes à domicile ou au bureau sont la solution la plus confortable pour les contribuables, celle qu’ils privilégieront probablement, en particulier ceux dont la situation personnelle rend difficiles les déplacements jusqu’aux locaux de l’administration fiscale ou ceux qui vivent dans des zones rurales où l’administration n’est pas accessible. Ces visites permettent aussi aux agents d’illustrer les nouveaux services numériques et de montrer aux contribuables comment les utiliser sur leurs appareils personnels, ce qui peut aider ces derniers à gagner en indépendance et à s’acquitter de leurs obligations fiscales à l’avenir. Bien qu’elles soient plus coûteuses pour l’administration, les visites en présentiel peuvent avoir une incidence positive sur la satisfaction des contribuables et, partant, sur l’image de l’administration fiscale de manière générale. Pour faciliter l’accès des contribuables à ces aides, certaines administrations dispensent aussi leur assistance dans des espaces publics. En Indonésie, par exemple, l’administration fiscale a ouvert des guichets fiscaux dans des zones de forte affluence telles que les centres commerciaux et les banques.

L’Encadré 5.5 explique comment l’ARC élargit ses services aux petites entreprises en leur proposant des visites en présentiel d’agents fiscaux.

Pour apporter une assistance directe, les agents de l’administration fiscale ne doivent pas forcément se rendre chez les contribuables. En effet, les services fiscaux peuvent aussi assurer celle-ci par téléphone. À cet égard, l’exemple de l’approche adoptée par le Canada est intéressant : l’administration exploite les données dont elle dispose pour déterminer les personnes qui peuvent prétendre à des prestations ou qui risquent d’en être privées et les contacte par courrier et par téléphone (Encadré 5.6).

L’assistance peut également être proposée par l’intermédiaire d’établissements partenaires tels que des universités et écoles ou d’autres organismes administrant les guichets fiscaux. S’agissant de ces derniers, les contribuables peuvent se rendre sur place, mais les services peuvent aussi être assurés à distance, notamment par téléphone. Les guichets fiscaux offrent un large éventail de services d’ordre fiscal, notamment une assistance aux déclarations fiscales et au règlement des différends. Les personnes qui y fournissent une assistance doivent être correctement formées à ces questions. Nombre d’administrations fiscales et de pouvoirs publics appuient des programmes nationaux de guichets fiscaux au moyen de financements directs, de formations et de certifications. En Australie, par exemple, les pouvoirs publics financent le programme national « Tax Clinic », ouvert à toutes les personnes admissibles : particuliers, petites entreprises et associations. Le programme est organisé par des universités avec l’appui de l’administration fiscale (Australian Taxation Office, 2021[10]).

Les ressources sont l’un des grands enjeux de l’assistance directe aux contribuables. À moins que l’administration fiscale ne gère son propre programme et n’y affecte des agents, il peut être difficile de trouver des fonctionnaires disposés à aider les contribuables à remplir leurs obligations fiscales en dehors des heures de travail.

Cette difficulté peut être surmontée en partie par des collaborations avec des groupes de bénévoles et un soutien à ceux-ci ainsi que par des partenariats avec des associations, écoles et universités. Ces partenaires, dont l’aide peut s’avérer précieuse, sont parfois déjà en contact avec le groupe de contribuables qui a besoin d’aide. Les initiatives des NAF ainsi que les programmes VITA/TCE de l’IRS et Tax Clinic de l’ATO, tous évoqués supra, constituent des exemples de soutiens de l’administration fiscale ou de partenariats de celle-ci avec des bénévoles ou universités en vue de venir en aide aux contribuables. Autre exemple : l’approche adoptée par l’administration fiscale chilienne (Encadré 5.7).

Les collaborations avec des intervenants qui ne sont pas rattachés à l’administration fiscale soulèvent toutefois un autre problème important : il faut assurer la formation des bénévoles et des autres personnes qui participent à l’assistance dans les cas plus complexes. Il s’agit là d’un élément essentiel pour garantir que les conseils prodigués sont conformes à la loi et aux directives applicables.

Afin de s’assurer que les bénévoles et autres fournisseurs d’assistance sont correctement formés aux questions fiscales ainsi qu’aux services et outils proposés, les administrations fiscales peuvent envisager de dispenser des formations et des programmes de certification. Les bénévoles qui y participent peuvent ainsi non seulement aider les autres et apprendre beaucoup, mais aussi acquérir des compétences dont ils pourront apporter la preuve grâce au certificat obtenu. Il s’agit là d’un moyen efficace de garantir que les bénévoles disposent des connaissances et des compétences adéquates, et de les inciter à s’impliquer. Reprenons l’exemple de l’Australie, où les bénévoles du programme Tax Help aident les citoyens à préparer et à transmettre leur déclaration fiscale, et les encouragent à accomplir ces démarches. Pour s’assurer que ces volontaires disposent des connaissances requises, l’ATO les forme aux outils et services nécessaires, par exemple son portail en ligne (Australian Taxation Office, 2021[9]).

De façon analogue, les bénévoles des programmes VITA/TCE de l’IRS qui aident les contribuables admissibles à remplir leur déclaration de revenus doivent suivre une formation et passer un examen de certification.5

Enfin, les administrations fiscales doivent réfléchir à la manière de faire connaître l’existence des programmes d’assistance. Il est en effet important, pour la réussite de ces initiatives, la satisfaction des contribuables et l’instauration d’un climat général propice au civisme fiscal, d’être en mesure de capter l’attention des contribuables et de s’assurer de leur participation aux programmes d’aide.

À cet égard, il peut être utile d’associer d’autres organismes publics à la promotion des initiatives. Au Chili, par exemple, l’administration fiscale collabore avec les municipalités, qui peuvent ainsi contacter les entreprises directement afin de les orienter vers les initiatives d’assistance. En Australie, les centres du programme Tax Help sont implantés dans différents espaces publics tels que des bibliothèques, des centres socioculturels, des organisations multiculturelles, etc. (Australian Taxation Office, 2021[9])

Références

[9] Australian Taxation Office (2021), Become a Tax Help volunteer or open a Tax Help centre, http://www.ato.gov.au/Individuals/Your-tax-return/Help-and-support-to-lodge-your-tax-return/Become-a-Tax-Help-volunteer-or-open-a-centre/ (consulté le 20 juillet 2021).

[10] Australian Taxation Office (2021), National Tax Clinic program, https://www.ato.gov.au/General/Gen/National-Tax-Clinic-program/ (consulté le 21 septembre 2021).

[8] Freudenberg, B. et al. (2017), « Tax Literacy of Australian Small Businesses », vol. 18/2, pp. 21-61, https://ssrn.com/abstract=3090125.

[6] Georgia Revenue Service (2019), 2018 Annual Report of the Revenue Service of the Ministry of Finance of Georgia, http://www.rs.ge/RsGe.Module/GetDoc/Get_File?doc_id=10602 (consulté le 20 July 2021).

[1] HM Revenue and Customs (2021), Measuring tax gaps 2021 edition - tax gap estimates for 2019 to 2020.

[4] OCDE (2019), Tax Administration 2019 : Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, Éditions OCDE, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/74d162b6-en.

[3] OCDE (2019), Tax Compliance Burden Maturity Model, http://www.oecd.org/tax/forum-on-tax-administration/publications-and-products/tax-compliance-burden-maturity-model.htm.

[2] OECD (2021), Tax Administration 2021 : Comparative Information on OECD and other Advanced and Emerging Economies, OECD Publishing, Paris, https://dx.doi.org/10.1787/cef472b9-en.

[5] UK Government (2021), Help frieds or family with their tax, https://www.gov.uk/help-friends-family-tax (consulté le 20 July 2021).

[7] United States Internal Revenue Service (2021), IRS Tax Volunteers, http://www.irs.gov/individuals/irs-tax-volunteers (consulté le 20 July 2021).

Notes

← 1. D’après la publication de 2021 portant sur le manque à gagner fiscal du Royaume-Uni, quelque 10 % du manque à gagner fiscal s’expliquent par des erreurs.

← 2. L’encadré 5.4 de l’édition 2021 de TAS apporte plus de détails sur les robots conversationnels mis en place par huit administrations fiscales. L’annexe 5.A de la même publication comporte une série de liens vers des présentations de ces assistants virtuels.

← 3. Des vidéos de témoignages recueillis dans le cadre du PCBMI peuvent être visionnées à l’adresse www.youtube.com/watch?v=V91NSVevH1o et www.youtube.com/watch?v=DkwX1JHG7iQ (consultées le 21 septembre 2021).

← 4. Une vidéo de présentation du service des agents de liaison de l’ARC est accessible à l’adresse suivante : https://www.canada.ca/content/dam/cra-arc/videos/ndvdls/lio-eng.mp4 (page consultée le 21 septembre 2021).

← 5. United States Internal Revenue Service (2021), IRS Tax Volunteers, http://www.irs.gov/individuals/irs-tax-volunteers (accessed on 20 July 2021).

Mentions légales et droits

Ce document, ainsi que les données et cartes qu’il peut comprendre, sont sans préjudice du statut de tout territoire, de la souveraineté s’exerçant sur ce dernier, du tracé des frontières et limites internationales, et du nom de tout territoire, ville ou région. Des extraits de publications sont susceptibles de faire l'objet d'avertissements supplémentaires, qui sont inclus dans la version complète de la publication, disponible sous le lien fourni à cet effet.

© OCDE 2021

L’utilisation de ce contenu, qu’il soit numérique ou imprimé, est régie par les conditions d’utilisation suivantes : http://www.oecd.org/fr/conditionsdutilisation.