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  • La présente Étude est publiée sous la responsabilité du Comité d’examen des situations économiques et des problèmes de développement de l’OCDE, qui est chargé de l’examen de la situation économique des pays membres.

  • L’économie irlandaise a traversé une crise grave en 2008, après une décennie de forte croissance qui a permis au pays de se hisser au quatrième rang des pays de l’OCDE pour ce qui est du niveau du PIB par habitant. Initialement, l’expansion était solidement assise sur des gains réels de productivité. Mais, au cours d’une période marquée par des coûts de financement peu élevés sur les marchés internationaux et une faible aversion au risque au niveau mondial, elle est devenue de plus en plus tributaire de la bulle immobilière spéculative – favorisée par les critères de prêt laxistes appliqués par les banques et une progression excessive du crédit – qui a éclaté au milieu de la crise économique et financière mondiale. Durant la dernière partie de la période de forte croissance, l’accélération des salaires a nui à la compétitivité internationale des coûts et le système bancaire a pris trop de risques, n’échappant à l’insolvabilité que grâce à l’aide de l’État, lorsque le marché immobilier s’est effondré. Les injections de capitaux réalisées pour contribuer à résoudre la crise ont entraîné une forte augmentation de la dette publique. Dans la foulée, les ménages ont été confrontés à des réductions de salaires, à des pertes d’emploi, à des hausses d’impôt et à ladiminution des prix de l’immobilier, même si les niveaux de vie et le sentiment de bien-être restent élevés par rapport aux autres pays.

  • De 1994 à 2007, l’économie irlandaise a obtenu des résultats spectaculaires. La croissance du PIB s’est établie en moyenne à 7 % par an, hissant les nivaux de vie du pays au quatrième rang des pays de l’OCDE. Au départ, l’expansion était solidement assise et les réels progrès accomplis au cours des années du Tigre celtique ont permis à l’Irlande de devenir l’une des économies les plus structurellement saines de la zone OCDE. Ces dernières années, toutefois, l’expansion s’est déséquilibrée et, en 2008, l’Irlande a été frappée par une crise bancaire de grande ampleur associée à une profonde récession (). L’inefficacité de la surveillance prudentielle dans un contexte de coûts peu élevés du financement sur les marchés interbancaires et de faible aversion au risque au niveau mondial a favorisé une croissance peu viable du crédit, qui a alimenté une bulle sur le marché de l’immobilier et a entraîné une flambée des dépenses intérieures. Avec l’explosion de la bulle immobilière, le système bancaire irlandais a enregistré des pertes financières sans précédent. Les autorités ont décidé de venir au secours du système bancaire en garantissant presque tous ses engagements et en recapitalisant les banques à l’aide de fonds publics. Bien que ces mesures aient fonctionné pendant quelque temps, l’accumulation d’importantes pertes bancaires a exercé des pressions sur la position budgétaire () et, à l’automne 2010, les marchés des capitaux ont conclu que la viabilité de la dette souveraine avait été compromise. Les marges de risque ont bondi et l’Irlande a, dans les faits, perdu accès aux marchés des obligations souveraines (). Les autorités ont donc demandé l’aide financière du FMI, de l’UE et de la BCE (Troïka) pour soutenir leur programme d’ajustement économique (). Des engagements financiers de 85 milliards d’euros (y compris 17.5 milliards d’euros de ressources de l’Irlande elle-même) ont été pris pour couvrir le déficit budgétaire, les coûts de la recapitalisation bancaire et les échéances de la dette sur la période 2011-13, laissant à l’Irlande un peu de marge de manœuvre pour améliorer sa situation. Les autorités ont mis en œuvre les mesures de manière transparente et le programme est en bonne voie.

  • La crise bancaire irlandaise, l’une des plus graves de la zone OCDE, et la récession qui l’a accompagnée ont lourdement pesé sur les finances publiques. Le pays connaît d’importants déficits depuis 2008 et la dette publique nette, qui avait été éliminée, est en forte résurgence. Du fait de la dégradation rapide des comptes budgétaires et de la garantie donnée par l’État aux engagements des banques, l’Irlande a perdu la confiance du marché des obligations souveraines et a dû recourir à l’aide de la communauté internationale. Sachant que le ratio dette brute/PIB est l’un des plus élevés de l’OCDE, que la prime sur les taux obligataires est importante et que la croissance du PIB nominal est faible, le retour à une situation budgétaire saine représente un sérieux défi. Un effort soutenu sera nécessaire pour résorber le déficit, regagner la confiance des marchés des capitaux et renforcer la croissance tendancielle par des réformes structurelles appropriées. Le programme d’ajustement économique soutenu par le FMI et l’UE prévoit un redressement graduel des finances publiques afin de stabiliser, puis de réduire, le ratio dette/PIB et de rétablir la viabilité budgétaire. Il s’appuie sur les progrès significatifs déjà réalisés, qui ont permis de contenir la dégradation des comptes budgétaires, et le gouvernement envisage de procéder en 2012 et les annéessuivantes à un ajustement supplémentaire conforme au programme. Celui-ci prévoit aussi un renforcement du cadre de gestion budgétaire comportant de grands changements institutionnels destinés à assurer la viabilité à moyen terme. L’effort d’assainissement bénéficie aussi des mesures prises pour rendre le secteur public plus efficace, ce qui est un moyen favorable à la croissance de réduire durablement le déficit.

  • L’Irlande se remet d’une crise bancaire d’une ampleur extrême née de l’exubérance excessive du crédit immobilier. Ces trois dernières années, le gouvernement a pris toute une série de mesures pour remédier à cette crise. Des créances immobilières irrécouvrables, d’un volume considérable, ont été transférées à une « structure de cantonnement » sous contrôle public, la NAMA, et les lourdes pertes correspondantes ont été intégralement passées en charge par les banques. La NAMA doit se concentrer sur la maximisation de la rentabilité pour les contribuables lors de la cession de ce portefeuille d’actifs. Le système bancaire a été recapitalisé à la mi-2011 après l’application aux banques de « simulations de crise » rigoureuses qui auront marqué un tournant essentiel en contribuant à mettre un terme aux pertes. La restructuration du système bancaire national autour de deux banques piliers est en cours mais la taille de ce système demeure trop importante. La revente de l’important portefeuille d’actifs étrangers des banques contribuera à la réduire. Elle permettra de diminuer la dépendance du secteur à l’égard de la liquidité du système européen de banques centrales tout en minimisant la pénurie de crédit d’origine interne. Avec le retour de la confiance dans le systèmefinancier, les autorités devraient restreindre davantage la garantie publique des engagements bancaires. La refonte de la réglementation et du contrôle bancaires devrait s’appuyer sur un ensemble plus large d’indicateurs et de règles allant au-delà des ratios classiques de fonds propres et devrait accorder plus d’attention aux interactions macrofinancières.

  • Après une récession d’une exceptionnelle gravité, l’économie irlandaise connaît une reprise tirée par les exportations. Néanmoins, le rythme de cette reprise est très variable d’un secteur à l’autre. Alors que l’industrie manufacturière et les services tournés vers l’exportation, dominés par de grandes entreprises multinationales, ont atteint des niveaux de production record, les secteurs axés sur le marché intérieur, où les PME irlandaises prédominent, peinent toujours à sortir de la crise. Compte tenu de la faiblesse de ce secteur traditionnel à forte intensité de main-d’œuvre, les taux de chômage restent très élevés, notamment parmi les hommes jeunes peu ou moyennement qualifiés, qui travaillaient souvent dans le secteur de la construction.Pour s’attaquer à un chômage élevé et persistant et conjurer ainsi les risques d’exclusion sociale, l’Irlande doit poursuivre plus avant une stratégie intégrée fondée sur trois piliers : une réforme du système de protection sociale de nature à valoriser le travail ; de meilleures politiques d’activation pour faciliter un redéploiement de la main-d’œuvre entre les secteurs ; et une compression drastique des salaires et d’autres dépenses d’exploitation afin de redevenir compétitive sur le plan international. Ce chapitre préconise notamment, en s’appuyant sur des initiatives ou engagements récents, des réformes destinées à accroître la compétitivité sur les marchés de produits, à stimuler l’innovation et à améliorer la qualité de l’enseignement, conditions indispensables à la prospérité économique.