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Quatre ans après le début de la Révolution de Jasmin, la Tunisie offre aujourd’hui un nouveau visage, reflet de la volonté de changement de toute une génération de jeunes Tunisiens qui sont descendus dans la rue avec l’espoir de bâtir un avenir meilleur. Les premiers résultats de cette métamorphose sociale et politique, malgré les coûts, les souffrances et les risques qu’elle a entraînés, ont été impressionnants.
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Malgré des années de croissance économique soutenue avant la révolution, la Tunisie a connu un creusement des inégalités en matière d’accès à des emplois de qualité, avec à la clé une hausse du chômage des jeunes en particulier. Cette situation s’est encore aggravée au lendemain de la crise économique mondiale et durant la transition à la démocratie.
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La Tunisie traverse une période agitée depuis la révolution de janvier 2011 et des tensions persisteront sans doute encore pendant quelques années, mais le pays a considérablement progressé durant cette période. Deux séries d’élections démocratiques ont été organisées avec succès en octobre 2011 et en octobre 2014. En 2014, la Tunisie a franchi un cap en adoptant une nouvelle constitution, qui définit le cadre dans lequel s’écrira l’avenir du pays. De nombreuses organisations non gouvernementales et groupes de réflexion ont vu le jour suite à l’entrée en vigueur de la loi de 2011 sur les associations, tandis que la loi relative à l’accès à l’information représente une étape marquante vers une amélioration de la transparence.
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Ce chapitre propose une vue d’ensemble de la situation des jeunes sur le marché de l’emploi en Tunisie et met en évidence quelques-uns des défis majeurs auxquels les autorités tunisiennes sont confrontées. Le marché du travail a toutes les difficultés à absorber de vastes cohortes de jeunes dont le niveau d’études est de plus en plus élevé. Il en résulte des taux d’emploi particulièrement bas qui s’expliquent à la fois par des taux de chômage élevés et des taux d’activité faibles. L’insertion professionnelle des jeunes constitue un grave problème et un jeune sur quatre est non scolarisé et sans emploi. Les femmes et les jeunes des régions du Centre-Ouest et du Sud sont particulièrement mal lotis. Même lorsque les jeunes Tunisiens et Tunisiennes travaillent, il s’agit souvent d’un emploi de mauvaise qualité : les emplois informels sont très répandus et concerneraient un jeune travailleur sur deux, et le pourcentage de contrats temporaires est important. En outre, les journées de travail sont longues et les bas salaires fréquents chez les jeunes.
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Le présent chapitre porte sur les facteurs qui, du côté de la demande, font obstacle à l’embauche des jeunes en Tunisie, comme le coût d’embauche (déterminé par le salaire minimum, les coûts non salariaux et les négociations collectives) et la législation de protection de l’emploi. Il passe également en revue les mesures actuellement en place pour remédier à ces obstacles (notamment les subventions salariales) et propose un certain nombre de solutions pour générer des conditions plus favorables à l’embauche des jeunes par les entreprises, tout en garantissant des salaires décents ainsi qu’un niveau de protection adapté pour les travailleurs. Les principales difficultés recensées dans ce chapitre sont les suivantes : des planchers salariaux élevés imposés par les conventions collectives sectorielles ; un écart important entre les niveaux de rémunération et les prestations dans le secteur privé et le secteur public, qui entraîne une pléthore de candidats à l’emploi dans ce dernier secteur et augmente les salaires de réserve ; et une législation de protection de l’emploi très rigide pour les contrats permanents et très souple pour les contrats temporaires, avec à la clé un dualisme du marché du travail, où l’emploi temporaire est plutôt un piège pour les jeunes Tunisiens qu’un tremplin vers un emploi plus stable.
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Ce chapitre étudie dans quelle mesure les politiques du marché du travail et les politiques sociales favorisent l’employabilité des jeunes en Tunisie. Il analyse en particulier les mécanismes de protection sociale visant à atténuer les conséquences négatives du non-emploi ; les services publics de l’emploi qui aident les jeunes à trouver ou retrouver un travail ; les programmes de formation à la création d’entreprises et les programmes qui accompagnent les jeunes créateurs d’entreprises ; enfin les politiques sociales qui aident les jeunes, en particulier les jeunes femmes, à surmonter les obstacles à l’emploi liés à leurs responsabilités familiales. Bien que la Tunisie soit dotée d’un système de protection sociale relativement développé, beaucoup de jeunes ont toutes les chances de passer entre les mailles de ce système à cause des taux élevés de chômage et d’activité informelle. Ce manque de protection constitue un obstacle majeur qui empêche les jeunes de chercher et de trouver des emplois productifs. En outre, les services publics de l’emploi disposent rarement des capacités nécessaires pour apporter aux jeunes chômeurs le soutien adapté dont ils ont besoin. Enfin, la Tunisie pourrait faire beaucoup plus pour aider les jeunes parents à concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales, en particulier en ce qui concerne le congé parental et l’aide aux parents pour financer les frais de garde de leurs enfants.
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Le présent chapitre étudie le système d’enseignement et de formation professionnels (EFP) en Tunisie et en évalue les points forts et les problèmes. À l’heure actuelle, ce système ne parvient pas à faciliter la transition avec le marché du travail, et ne répond pas de façon adéquate aux besoins des employeurs. Les deux principaux problèmes sont : i) le manque d’attractivité de l’enseignement et de la formation professionnels en Tunisie, notamment les effets négatifs de la faible valorisation des collèges techniques, et le sous-développement des options de qualité dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire ; ii) le fait que l’éventail de l’offre de formations (entre les domaines d’étude) dépende principalement des capacités du système et peut ne pas refléter les besoins de l’économie. Ce chapitre préconise la mise en oeuvre d’une série de réformes politiques se renforçant mutuellement, notamment le développement stratégique de l’EFP dans le deuxième cycle du secondaire et le renforcement des dispositifs visant à impliquer les employeurs. Enfin, le chapitre se penchera sur l’offre de formation à l’entrepreneuriat au sein du système d’EFP, et mettra en évidence les possibilités d’améliorer la qualité de l’offre et son accessibilité.
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Le présent chapitre examine les possibilités de création d’emplois pour les jeunes dans l’économie verte et les mesures susceptibles de développer les compétences et l’esprit d’entreprise autour de ces opportunités. L’économie deviendra inévitablement plus écologique, sous l’effet de facteurs externes, comme le changement climatique, les pressions sur les ressources non renouvelables et les politiques d’adaptation qui en découlent, ou grâce à l’application d’une stratégie nationale de développement durable. Cette évolution aura des incidences sur l’enseignement et la formation professionnelle (EFP), tant en termes de compétences recherchées que d’opportunités de création d’entreprises. Les effets de l’écologisation de l’économie ne seront pas les mêmes dans tous les secteurs, et plusieurs domaines d’activité où l’apparition d’emplois verts pourrait ouvrir de nouvelles perspectives d’emploi, pour les jeunes notamment, seront passés en revue. Pour mettre à profit ces opportunités, les pouvoirs publics devront définir clairement leurs stratégies, priorités et mesures à prendre.