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  • Bien souvent, un jour arrive où les capacités fonctionnelles et physiques déclinent. Pour continuer à mener une vie active et enrichissante, une assistance s’avère alors nécessaire, qu’elle provienne du cercle familial ou amical ou soit fournie par des personnes employées à cette fin.

  • Le présent ouvrage est l’aboutissement de travaux menés à l’OCDE dans un esprit de réelle coopération entre son Secrétariat, les délégués nationaux et des experts issus de nombreux pays de la zone OCDE. Au sein du Secrétariat, deux Divisions de la Direction de l’emploi, du travail et des affaires sociales – la Division de la santé et la Division des politiques sociales – ont collaboré au projet. Le rapport a été élaboré par Francesca Colombo

  • En 1950, moins de 1 % de la population mondiale était âgé de plus de 80 ans. Dans les pays de l’OCDE, la part des personnes âgées de 80 ans et plus devrait passer de 4 % en 2010 à près de 10 % en 2050. Ce vieillissement de la population s’accompagne d’un desserrement des liens familiaux. Le besoin de prise en charge de proximité des seniors fragiles et handicapés s’accroît, et va même s’accélérer dans la zone OCDE.

  • Étant donné que la population vieillit, que rien ne permet d’affirmer que l’invalidité est en recul chez les personnes âgées, que les liens familiaux se distendent et que l’activité des femmes progresse, il n’est pas surprenant que le besoin de prise en charge des soins aux personnes âgées fragiles ou handicapées se fasse de plus en plus sentir*. La croissance des cohortes âgées constitue le principal facteur d’augmentation de la demande d’aide et de soins de longue durée dans l’ensemble des pays de l’OCDE. D’ailleurs, le débat de fond sur les réformes à effectuer dans ce domaine s’inscrit souvent dans le contexte des pressions qu’exerce le vieillissement des sociétés. Les statistiques sont à cet égard éloquentes. En 1950, moins de 1 % de la population mondiale était âgé de plus de 80 ans. Dans les pays de l’OCDE, la part des personnes âgées de 80 ans et plus devrait passer de 4 % en 2010 à près de 10 % en 2050.

  • La prise en charge de la dépendance (ou prise en charge des soins de longue durée) est un secteur de l’économie en expansion, mais relativement modeste. Les personnes de plus de 65 ans, et notamment de plus de 80 ans, sont celles qui ont une probabilité plus grande de se voir dispenser de tels services, et les femmes en sont les principales bénéficiaires. Il s’agit d’un secteur à forte intensité de main-d’oeuvre qui est essentiellement financé par des fonds publics. Les dépenses liées à la dépendance représentent en moyenne 1.5 % du PIB dans la zone OCDE. L’essentiel des services est fourni par des aidants familiaux. Le personnel employé dans le secteur (composé dans la majorité des pays de femmes travaillant à temps partiel) représente environ 1.3 % de la population active totale des pays de l’OCDE. Ces dix dernières années, plusieurs États ont instauré de nouveaux dispositifs de prise en charge de la dépendance : ainsi, des systèmes de prestations en espèces destinées à financer l’aide et les soins de longue durée ont été créés en Europe et aux États Unis pour élargir le choix et la latitude des usagers. Ces dispositifs sont souvent fragmentés en raison de la diversité des publics visés, des modes de gouvernance et de fourniture, et du personnel. Ce chapitre brosse un tableau du secteur dans les pays de l’OCDE. Il commence par définir ce qu’est la prise en charge des soins de longue durée puis, dans les parties suivantes, présente les usagers, les prestataires et les financeurs de services de ce secteur. Une autre partie décrit les services offerts, en s’attardant plus longuement sur les systèmes de prestations en espèces destinées à financer les soins, et le chapitre se clôt sur une partie présentant brièvement l’évolution récente des politiques menées dans ce domaine.

  • Selon toute vraisemblance, les pressions auxquelles sont confrontés les systèmes de prise en charge de la dépendance vont s’accroître à l’avenir pour au moins quatre raisons. Premièrement, même si le rythme du vieillissement démographique est très variable d’un pays à l’autre et s’il existe des incertitudes quant à l’évolution de l’incapacité au sein de la population, les transformations démographiques entraîneront une hausse de la demande de soins de longue durée dans toutes les sociétés. Deuxièmement, les changements qui affectent les sociétés – diminution de la taille de la famille, évolution des choix résidentiels des personnes atteintes d’une incapacité, progression du taux d’activité des femmes – sont susceptibles d’induire une baisse du nombre d’aidants informels et, partant, une hausse du besoin de soins dispensés par des aidants rémunérés. Troisièmement, à mesure que les sociétés s’enrichissent, les individus exigent des systèmes de protection sociale de meilleure qualité, répondant davantage à leurs besoins. La population souhaite que les systèmes de soins soient axés sur le patient et offrent des services bien coordonnés. Quatrièmement, le progrès technologique accroît les possibilités d’intervention à domicile, mais pourrait rendre nécessaire une réorganisation des soins. Ces différents facteurs vont entraîner une hausse de la demande de soins de longue durée et vont également entraîner des pressions pour améliorer l’offre de soins et leur performance et, par conséquent, leur coût. Ce chapitre présente les prévisions démographiques relatives à la zone OCDE, ainsi que des projections sur les aidants familiaux dans quelques pays de l’OCDE et les coûts de la prise en charge de la dépendance.

  • Il est important de promouvoir le rôle des aidants informels (cercle familial et amical fournissant aux personnes âgées fragilisées une assistance essentiellement non rémunérée) pour instaurer un bon continuum de soins entre la sphère informelle et la sphère formelle. Cette prise en charge de personnes dépendantes peut renforcer l’estime qu’ont d’eux-mêmes ceux qui s’y consacrent, mais les aidants d’âge actif peuvent rencontrer des difficultés pour concilier travail rémunéré et soins informels, et être amenés à cesser d’exercer leur activité rémunérée ou à réduire les horaires de cette dernière. De tels choix peuvent avoir une incidence négative sur leur future aptitude à l’emploi et conduire à leur exclusion définitive du marché du travail. En outre, la prise en charge de personnes dépendantes peut être source de surmenage et d’anxiété pour les aidants et se traduire par une dégradation de leur santé physique ou mentale. Le présent chapitre décrit les caractéristiques des aidants familiaux et l’incidence de l’assistance qu’ils apportent à une ou des personnes âgées sur leur situation au regard de l’emploi et sur leur état de santé. Il fournit ainsi un éclairage sur la manière d’élaborer au profit des aidants des réformes destinées : 1) à les aider à concilier la prise en charge d’une personne dépendante et une activité professionnelle rémunérée ; et 2) à renforcer leur bienêtre physique et mental en amoindrissant leurs problèmes de santé mentale. Les pays qui souhaitent préserver ou accroître le rôle de l’aide familiale doivent aussi se préoccuper d’alléger la charge qui pèse sur les aidants familiaux et de réduire le coût économique de cette forme d’aide.

  • Dans la plupart des pays, ce sont les aidants familiaux et les amis qui fournissent la majeure partie des soins de longue durée ; la valeur économique estimée de cette dernière est très supérieure à celle des soins prodigués par les effectifs du secteur. Compte tenu des difficultés démographiques et des problèmes de coût auxquels vont être confrontés à l’avenir les systèmes de prise en charge de la dépendance de la zone OCDE, il est essentiel que l’assistance informelle continue de jouer un rôle, d’autant plus qu’elle correspond à la forme d’aide que préfèrent les bénéficiaires eux mêmes. Continuer de rechercher des solutions pour soutenir et préserver l’offre familiale de services pourrait donc être une stratégie avantageuse pour tous les acteurs concernés – bénéficiaires, aidants et dispositifs publics. Ce chapitre présente une vue d’ensemble et une évaluation des mesures actuellement en place en faveur des aidants familiaux sous trois angles principaux, à savoir les soins de longue durée et le marché du travail, le bien être des aidants et leur reconnaissance financière. Il examine ensuite la question de savoir si ces mesures facilitent réellement la conciliation de la prise en charge d’une personne dépendante et d’un emploi rémunéré, atténuent le surmenage et les tensions psychologiques des aidants, et permettent une reconnaissance des autres coûts associés à la prise en charge de la dépendance.

  • Ce chapitre est consacré aux effectifs et aux caractéristiques de la main-d’oeuvre du secteur de la dépendance en termes de répartition par sexe et d’éventail des qualifications, de temps de travail et de conditions de travail. Il porte sur les deux principales catégories de personnels employés dans ce secteur : ceux qui interviennent à domicile et ceux qui travaillent en établissement. Il décrit l’évolution de l’éventail des qualifications dans le secteur de la dépendance puis examine le poids relatif des différents facteurs – comme le niveau des salaires ou les conditions de travail – qui expliquent les difficultés à faire coïncider l’offre et la demande de main-d’oeuvre. L’analyse tente de répondre aux questions suivantes : l’offre de main-d’oeuvre estelle suffisante pour répondre à la demande actuelle (et potentielle) ? Quels sont les effectifs employés dans les différents segments du secteur de la dépendance et quels sont les caractéristiques de ces travailleurs ? Quelles sont les conditions de travail dans le secteur de la dépendance ? Comment interpréter les évolutions observées au fil du temps ?

  • S’il est possible que les retombées de la crise économique à court terme atténuent les pénuries de main-d’oeuvre dans le secteur de la dépendance, seule une approche reposant sur des mesures coordonnées permettra d’y disposer des ressources humaines nécessaires à plus long terme. Ces mesures peuvent être axées sur la formation, le recrutement et la fidélisation du personnel, ainsi que sur le contenu du travail, la productivité et la qualité. Elles peuvent viser certains segments du secteur de la dépendance (aide et soins à domicile, accueil en centre de jour, accueil en établissement), mais aussi le secteur dans son ensemble. En outre, des mesures s’adressant spécifiquement à différentes catégories de personnel (personnel infirmier, personnel peu qualifié) peuvent se révéler nécessaires du fait qu’il est rare que les infirmières et infirmiers fassent spontanément le choix de travailler dans le secteur de la dépendance et que beaucoup de travailleurs peu qualifiés perçoivent l’aide aux personnes dépendantes non pas comme un « métier », mais comme un « emploi sans avenir » offrant peu de perspectives de carrière hormis la possibilité de changer d’emploi. Il peut en résulter un fort roulement du personnel et des difficultés à le maintenir en poste, ce qui est coûteux pour les employeurs, les finances publiques et les personnes dépendantes et leur famille. Parmi les solutions envisageables pour remédier à cette situation figurent des politiques destinées à valoriser le travail et les effectifs du secteur de la dépendance, ce qui pourrait exiger de réformer de façon substantielle la manière dont la prise en charge de celle-ci est organisée et gérée. En outre, dans certains pays, les travailleurs nés à l’étranger représentent une forte proportion de la main-d’oeuvre du secteur et il n’est pas exclu que des questions se posent quant à la pérennité de cette solution. Ce chapitre examine les politiques mises en oeuvre pour accroître les flux de main-d’oeuvre dans le secteur de la dépendance, fidéliser ces effectifs et améliorer leur productivité.

  • Avec le vieillissement de la population et le recul des soins familiaux, le recours aux services formels d’aide et de soins de longue durée pour les personnes handicapées est en hausse dans tous les pays à revenu élevé. Une demande accrue de services formels commence également à apparaître car la population souhaite des soins de grande qualité. Ces facteurs entraînent une hausse du coût de la prise en charge formelle de la dépendance dans les pays de l’OCDE et soulèvent sur son financement des interrogations qui occupent une place de plus en plus importante dans les débats d’orientation. Ce chapitre propose un survol de la couverture des services de prise en charge des soins de longue durée dans les pays de l’OCDE. À des fins d’illustration, les pays sont classés en trois grands groupes, à savoir les régimes universels et complets, les régimes sous conditions de ressources et les systèmes mixtes. Au fil du temps, les systèmes de couverture évoluent vers des systèmes de droits ou de prestations universels et vers des modèles offrant plus de choix à l’usager et, dans de nombreux cas, un ciblage accru des prestations au profit des personnes les plus dépendantes.

  • La hausse attendue des dépenses totales de prise en charge de la dépendance conduit certains pays de l’OCDE à s’intéresser au rôle potentiel de l’assurance privée en la matière. En effet, la planification financière en vue de la retraite peut intégrer la souscription d’un produit de couverture dépendance privée visant à protéger le revenu et le patrimoine du risque d’un besoin potentiel de soins de longue durée, à réduire ainsi la charge qui pèserait sur la famille et à élargir la palette des services possibles. Les avis sont néanmoins très partagés quant aux avantages d’une couverture dépendance privée. Pour certains, elle permettrait de mobiliser de nouvelles ressources financières en faveur de la prise en charge des soins de longue durée, allégeant ainsi la nécessité pour l’État d’accroître son soutien à l’avenir. Pour d’autres, elle pourrait être un moyen moins efficient et plus coûteux que la mutualisation publique d’assurer une couverture universelle et exhaustive. Les dispositifs de couverture dépendance privée représentent de petits marchés dans les pays de l’OCDE. Le présent chapitre décrit et analyse le rôle et l’importance des dispositifs d’assurance privée de la zone OCDE. Il s’intéresse aux facteurs susceptibles d’influer sur la taille des marchés de l’assurance dépendance et aux mesures prises par les pays pour encourager leur développement. Il examine ensuite le rôle que les dispositifs privés d’assurance pourraient jouer à l’avenir dans les systèmes de prise en charge de la dépendance.

  • La plupart des gens ont des difficultés à prévoir s’ils auront besoin ou non de soins de longue durée à l’avenir et, dans l’affirmative, quels seront le type, la durée et le coût de l’assistance nécessaire. Au cours des décennies à venir, les dépenses publiques devraient augmenter rapidement dans la plupart des pays de l’OCDE, notamment en raison de la hausse attendue des charges liées au vieillissement : pensions des régimes publics, soins de santé, soins de longue durée, etc. D’une manière générale, la composition actuelle et le niveau des impôts devraient se solder par une hausse des recettes plus lente que celle des dépenses, et entraînent donc un risque de report de leur coût sur les générations futures. Pour les pouvoirs publics, le défi consiste donc à fournir une protection équitable contre le risque financier associé à la prise en charge de la dépendance, tout en veillant à ce que l’équilibre des recettes et des dépenses afférentes soit viable à long terme. L’universalisme ciblé et un ensemble de mesures de financement collectif tournés vers l’avenir sont susceptibles d’aider à trouver le juste équilibre entre ces deux priorités rivales. C’est ce que le présent chapitre se propose d’étudier.

  • Il est généralement admis que le vieillissement des populations entraînera une augmentation de la demande de services dans les années à venir, exerçant ainsi une pression à la hausse sur l’ensemble des dépenses des dispositifs formels de prise en charge de la dépendance, dans un contexte où l’on prévoit également une augmentation de certains postes de dépenses importants tels que les retraites et la santé. Les gouvernements auront par conséquent de bonnes raisons, sans doute, de vouloir s’assurer que les dépenses consacrées à ce secteur se justifient ; autrement dit, que les dispositifs de prise en charge des soins de longue durée présentent un rapport coût-résultats intéressant. L’étude des pratiques des pays de l’OCDE fait apparaître diverses politiques visant à améliorer l’efficience de ces dispositifs et l’« interface » entre soins liés à la dépendance et soins de santé. Il est clair, cependant, que ce travail devra être poursuivi à l’avenir car, souvent, aucune conclusion définitive ne peut être tirée à ce stade.